« L’invasion russe perturbe la logistique et limite actuellement les exportations ukrainiennes. Les dégâts occasionnés par le conflit (perte de cheptel et de marchandises, bombardements d’usines, inflation des intrants et des médicaments vétérinaires…) paraissent limités et pénalisent surtout les entreprises les plus fragiles », décrit le compte-rendu du conseil spécialisé des viandes blanches de FranceAgriMer qui s’est réuni le 25 mai 2022.
Faisant suite à l’invasion russe, « l’Union européenne a décidé de supprimer les droits de douane sur les exportations ukrainiennes », rapporte FranceAgriMer. Selon l’organisme, « les filières des viandes blanches se montrent très inquiètes de cette mesure qui pourrait déstabiliser le marché européen en cas d’importations massives d’Ukraine. »
En effet, le poulet ukrainien pourrait notamment concurrencer l’offre française sur ses destinations « traditionnelles », « alors que l’Ukraine n’est pas encore soumise aux normes européennes sanitaires et de bien-être animal ».
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Fournisseur « significatif » de poulet
En 2021, l’Ukraine a produit 1,05 million de tonnes-équivalent carcasse de poulet, « soit l’équivalent d’un pays comme l’Allemagne ou l’Italie, rappelait François Cadudal, responsable du service de l’économie de l’Institut technique de l’aviculture (Itavi), lors d’un webinaire le 8 avril 2022. C’est un fournisseur significatif sur le marché mondial », poursuit le spécialiste.
D’après FranceAgriMer, l’Ukraine a exporté 400 000 tonnes de viande de volaille, « essentiellement du poulet vers l’Arabie Saoudite, les Pays-Bas, la Slovaquie, les Émirats arabes unis et l’Azerbaïdjan ». L’entreprise MHP serait à l’origine de 90 % de ces envois. « Elle vise aujourd’hui les marchés du poulet haut de gamme en Europe et au Moyen-Orient après avoir saturé le marché ukrainien, de moins en moins rémunérateur. »
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Vers une offre en « fort recul »
Mais la guerre pourrait mettre à mal ces ambitions. « On aura certainement en 2022 une offre ukrainienne [de poulet] en fort recul », avance François Cadudal. Si les ateliers de production ne sont pas les plus exposés aux zones de combats, « des problèmes de dépendance d’intrants se posent, qu’il s’agisse de produits pharmaceutiques ou d’œufs à couver. Il y a aussi la question de la main-d’œuvre, avec une part importante de la population masculine qui est aujourd’hui mobilisée sur l’effort de guerre ».
Pour l’économiste, cette situation pourrait profiter à d’autres importants exportateurs de poulet. « En 2021, l’Ukraine représentait 20 % de l’ensemble des importations de l’Union européenne. On a en parallèle une offre européenne en recul […], ce qui, a priori, mécaniquement, entraînera plus d’importations en provenance des pays tiers. » Il évoque notamment le Brésil, qui « malgré une hausse des coûts généralisée reste compétitif sur le marché européen ».
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