« Le bien-être animal n’est pas un petit sujet, il va crescendo et il va durer, prévient Christiane Lambert, présidente de la FNSEA. Les premiers signaux sont apparus dans les années 1970, mais nous avons fait l’erreur de les ignorer. À présent, il faut prendre le taureau par les cornes. »
Une position partagée par Thierry Hétreau, vétérinaire et coauteur du film « Même pas mal ! », sur le bien-être des animaux d’élevage, mais aussi sur celui des éleveurs. « Les choses évoluent, on ne parlait pas de ce sujet quand je faisais mes études. Maintenant, il nous arrive d’intervenir dans les écoles agricoles, souvent à la demande des étudiants. »
« Nous faisons presque tout bien, mais nous ne le disons pas »
« Une enquête récente montre qu’en matière de qualité de la viande bovine, les consommateurs ne font confiance qu’aux éleveurs et aux bouchers indépendants », présente Olivier Mevel, consultant en stratégie des entreprises agroalimentaires.
« Ce qui fait peur aux consommateurs, c’est leur méconnaissance du milieu de la viande. Il faut ouvrir nos élevages et pouvoir expliquer ce qui se passe dans les abattoirs », ajoute Didier Giraud, éleveur et intervenant à l’émission des Grandes Gueules. Dans la même veine, Thierry Hétreau incite les producteurs à prendre la parole sur les réseaux sociaux.
« Nous faisons presque tout bien dans nos élevages, mais nous ne le disons pas, constate Christiane Lambert. Le fait de mettre sur le papier les pratiques actuelles rassurera les éleveurs car finalement, la marche n’est pas si haute entre la réalité et les souhaits des Français. »
Ne pas se laisser distancer
Christiane Lambert prend le cas de l’aménagement des cages des poules pondeuses comme exemple à ne pas reproduire. « En 2012, lorsque la réglementation européenne a imposé des modifications, l’Allemagne en a profité pour faire une double réforme, sentant bien que la population ne se satisferait pas longtemps de poules en cages, fussent-elles plus grandes et mieux adaptées. En France, nous avons choisi de réformer a minima. Résultat, 70 % des bâtiments allemands sont aujourd’hui alternatifs alors que nous visons 50 % d’œufs de “poules libres” en France, à l’horizon de 2022. »
« Pour ne pas se faire imposer des cahiers des charges par la grande distribution, il faut les rédiger nous-mêmes, poursuit Christiane Lambert. Nous sommes les experts en bien-être, à nous de nous fixer des objectifs réalistes. »
« À travers notre film, nous souhaitons que les éleveurs s’approprient le sujet du bien-être animal et n’agissent pas qu’en réaction à des normes ou à des groupuscules, explique Thierry Hétreau. Il y a encore de la marge de manœuvre en élevage même si les producteurs pensent très bien faire leur métier. »
Quant aux images filmées par les associations de protection animale, les intervenants les qualifient tous « d’indéfendables ». « Il nous faut être nickel chrome », incite Christiane Lambert.