La concentration des coopératives agricoles a largement occupé les débats, le 12 novembre 2025, lors de l’audition du président de La Coopération Agricole, Dominique Chargé, devant la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale. Des députés ont souligné que 60 % du chiffre d’affaires du secteur coopératif agricole est aujourd’hui détenu par les vingt plus grandes structures. Le projet de fusion entre Agrial et Terrena, annoncé le 22 septembre dernier, regrouperait selon eux près de 30 000 adhérents pour un chiffre d’affaires cumulé de plus de 12 milliards d’euros.
« Éviter que la logique industrielle et financière ne prenne le pas sur l’esprit mutualiste »
« Comment garantir que les petits adhérents gardent voix au chapitre ? a lancé Géraldine Grangier (Rassemblement national, Doubs). La question n’est pas d’opposer petites et grandes coopératives, mais de savoir comment éviter que la logique industrielle et financière ne prenne le pas sur l’esprit mutualiste. »
René Pilato (La France insoumise, Charente), a abondé dans ce sens : « Ces immenses coopératives créent une distance grandissante entre les agriculteurs coopérateurs et les dirigeants des coopératives, parfois au détriment de leurs propres intérêts. » Françoise Buffet (Ensemble pour la République, Bas-Rhin) a, quant à elle, craint que cette recherche de taille critique ne se fasse « au détriment des valeurs fondatrices du modèle coopératif : la gouvernance démocratique, un homme une voix, la proximité territoriale. »
Structurer et consolider
Face à ces inquiétudes, Dominique Chargé a martelé le même message tout au long de l’audition : « La taille n’est pas un objectif, c’est la conséquence. » Selon lui, ces rapprochements répondent d’abord à la nécessité d’assurer la « performance territoriale » et la « résilience des modèles économiques d’exploitation agricole ».
Pour le président de La Coopération Agricole, ces fusions sont motivées par la mutualisation des expertises et des moyens, la pérennisation de l’investissement dans la transformation, et l’optimisation des infrastructures logistiques. « Nous devons par les moyens de la concentration, en tout cas de la mutualisation de nos expertises, nous donner les moyens de pouvoir redynamiser ces territoires », a-t-il expliqué, citant notamment les « zones intermédiaires » où « les modèles agronomiques fondés il y a 30 ans sont en train de s’effondrer ».
Dominique Chargé a également souligné les bénéfices environnementaux de cette densification. « Nous allons pouvoir limiter le transport et optimiser les moyens logistiques de nos infrastructures, ce qui permettra des gains de CO2 sur nos territoires, » affirme-t-il.
Sur la question de la gouvernance démocratique, le président de La Coopération Agricole assure que « les conseils d’administration sont l’émanation de structures de gouvernance locale sur les territoires et de gouvernance de secteur ». Leur mission, selon lui, est de « protéger l’intérêt général de l’ensemble des associés coopérateurs sur un territoire », parfois « au détriment ou en opposition de la somme d’intérêts particuliers ».
Pour appuyer sa position sur la nécessité de cette structuration, Dominique Chargé a pris l’exemple de la filière betterave sucrière, soutenant que sil elle ne s’était pas « structurée pour atteindre la taille et l’efficacité » d’aujourd’hui, « elle n’existerait plus. »