La semaine du 9 février 2025 a été marquée par la publication de multiples rapports internationaux. MPOB, USDA ou encore Conab ont actualisé leurs différents bilans. À l’échelle française également les mises à jour sont nombreuses. FranceAgriMer réajuste ses bilans de la campagne 2024-2025 en France, Agreste ses perspectives de surfaces en céréales d’hiver et enfin Céré’Obs publie ses premières conditions de cultures de l’année 2025.

Un potentiel de production de blé français encore à risque cette année

Le prix du blé français cède 2 €/t sur la semaine, à 226 €/t rendu Rouen. La céréale française poursuit sa quête de compétitivité, afin de trouver de nouveaux débouchés à l’export. D’ailleurs, FranceAgriMer abaisse une fois de plus l’objectif export pays tiers à 3,4 millions de tonnes, ce qui est bien loin des 10 millions de tonnes de ces dernières années. Il faut dire que si l’Algérie a acheté cette semaine un minimum de 330 000 tonnes de blé pour avril, l’origine française ne peut toujours pas participer à ces appels d’offres à cause des relations diplomatiques compliquées entre les deux pays.

La Chine n’offre pas non plus d’alternative, ses achats étant limités depuis le début de campagne. Ce ralentissement de la demande est officialisé par le département de l’Agriculture des États-Unis (USDA) qui abaisse l’objectif import de l’empire du Milieu de -2,5 millions de tonnes, à 8 millions de tonnes en blé, mais aussi de -3 millions de tonnes, à 10 millions de tonnes en maïs.

Dans ce contexte, les exportateurs français comptent néanmoins sur la demande du Maroc et de l’Afrique subsaharienne. Il faut dire que la concurrence mer Noire s’atténue. Le prix du blé russe grimpe à 249 $/t FOB Novorossiysk, son plus haut niveau depuis le début du mois de juin dernier.

Les exportations russes seront également freinées à compter du 15 février, date à partir de laquelle commence le quota à l’export du pays. Il faudra cependant tenir compte de la concurrence de l’hémisphère sud. Le blé argentin est actuellement le moins cher du monde, à l’heure où la production australienne pourrait finalement dépasser les 32 millions de tonnes encore attendues par l’USDA.

Ces préoccupations commerciales restent actuellement le principal élément directeur des cours, même si les craintes climatiques gagnent en importance. La période hivernale est particulièrement sèche en Ukraine et dans le sud de la Russie, quand à l’inverse, l’ouest de l’Union Européenne est encore pénalisé par l’excès d’eau.

FranceAgriMer coupe d’ailleurs drastiquement son estimation de surfaces en bon ou excellent état de 86 à 73 % entre la fin novembre et aujourd’hui, ce qui n’est que très légèrement mieux que les 68 % de l’an passé. De son côté, Agreste estime néanmoins que les conditions pendant les semis ont permis d’augmenter la sole française à 4,57 millions d’hectares en 2025, soit une hausse de + 10 % après la catastrophe de l’an passé.

Regain de fermeté des orges fourragères

L’orge fourragère française retrouve des couleurs. Déjà, le complexe fourrager dans son ensemble est soutenu par le regain de fermeté des cours internationaux du maïs. En effet, le maïs américain est aujourd’hui plébiscité par de nombreux acheteurs internationaux, à l’heure où la sécheresse du mois de janvier a mis à mal le potentiel de production argentin.

Cependant, si l’orge française se stabilise depuis deux semaines entre 210 et 215 €/t rendu Rouen, au plus haut depuis la première semaine de juin dernier, c’est aussi en raison de sa propre demande. Depuis un mois, la prime fourragère est notamment passée de -20 €/t à -11 €/t à Rouen. Pas loin de 290 000 tonnes d’orges françaises ont été exportées en janvier, soit le niveau le plus élevé de la campagne actuelle. Et les chargements français restent soutenus en février à destination du Maroc, de la Tunisie, de la Libye et de la Jordanie.

Ces acheteurs internationaux ne souhaitent en effet plus importer de produits allemands d’origine végétale, après que quelques cas de fièvre aphteuse ont été recensés. C’est pourquoi FranceAgriMer augmente de 0,1 million de tonnes, à 2 millions de tonnes son objectif d’exportations d’orge fourragère vers pays tiers. Les stocks de fin de campagne sont ainsi mécaniquement abaissés à 1,56 million de tonnes, ce qui reste tout de même le stock le plus élevé depuis 2010-2011.

Dans le même temps, les regards se portent sur la prochaine récolte. Agreste estime les surfaces 2025 à 1,21 million d’hectares, soit une baisse de 2,1 % par rapport aux 1,24 million d’hectares de l’an passé. Et pour l’instant le potentiel de production est toujours à risque à cause de l’excès d’humidité persistant. FranceAgriMer dégrade à 68 % la part des surfaces d’orges d’hiver en bon ou excellent état, soit une perte de 15 points depuis la fin novembre, ce qui est même inférieur aux 71 % de l’an passé à date.

Du côté des orges de printemps, la prime brassicole s’est écrasée sous les 10 €/t à Creil, les acheteurs européens ayant déjà bien couvert leurs besoins. C’est ainsi que sur les deux dernières semaines, elle cède 8 €/t, à 231 €/t FOB Creil. Alors que la future sole de printemps est encore incertaine, les prix proposés en nouvelle campagne sont un peu plus incitatifs et se stabilisent autour de 250 €/t à Creil.

Le colza dans une nouvelle phase de stabilisation

La forte volatilité sur le marché de la graine de colza qui s’est étalée de septembre 2024 jusqu’à la fin du mois de janvier laisse maintenant place à une période d’accalmie. Les prix de la graine de colza Fob Moselle sont depuis deux semaines dans une phase de consolidation sur les niveaux des 520 €/t dans l’attente de nouveaux éléments.

L’huile de palme s’est présentée en début de semaine comme le potentiel facteur catalyseur du complexe. La publication du rapport du Malaysian Palm Oil Board (MPOB) ce lundi témoigne de stocks toujours faibles en Malaisie dans un contexte de baisse saisonnière de la production. Cette dernière recule en janvier de 16 % par rapport au mois précédent tandis que les exportations malaisiennes baissent de 12 %.

En parallèle, l’Indonésie estime que son programme sur les nouveaux mandats de biodiesel sera atteint au cours du mois de mars. Ainsi, des éléments de tension refont surface sur le marché des huiles végétales et poussent l’huile de palme à rebondir à Rotterdam sur ses plus hauts niveaux, à 1 450 €/t.

Les huiles concurrentes sont pour le moment insensibles à ce mouvement. Ainsi, l’huile de colza se stabilise à 1 060 €/t et celle de tournesol à 1 150 €/t. À moyen terme, les opérateurs seront attentifs à l’évolution des conditions de culture sur la prochaine campagne. Le colza rencontrera en France comme limite initiale une baisse des surfaces emblavées pour la récolte 2025. La sole française devrait atteindre selon Agreste 1,272 million d’hectares, soit une baisse de 4,1 % par rapport à la précédente récolte.

Baisse du prix du tourteau de soja

Les publications de la semaine permettent de prendre un peu plus de recul sur la situation en graine de soja en Amérique du Sud. L’USDA a ouvert le bal ce mardi 11 février en actualisant son bilan mondial. Le point le plus important de cette publication est la révision en baisse de 3 millions de tonnes de la production de soja en Argentine. Attendue initialement à 52 millions de tonnes, celle-ci est donc maintenant revue par le ministère de l’Agriculture américain à 49 millions de tonnes.

La sécheresse et les températures caniculaires de janvier ont finalement eu raison du potentiel argentin qui ne profite que depuis peu d’un retour des pluies. Une partie des dégâts semble irréversible et les questions qui persistent portent surtout sur les futures réductions de la production que les institutions locales devront opérer dans les mois à venir. Au Brésil, l’USDA et l’institut local Conab ne tombent toujours pas d’accord sur le volume final que pourrait atteindre la récolte brésilienne.

Le premier anticipe une production de 169 millions de tonnes alors que le second révise même en légère baisse de 0,5 million de tonnes son estimation, à 166 millions de tonnes. En faisant abstraction de la réduction de quelques millions de tonnes des potentiels de production argentin et brésilien, force est de constater que la production sud-américaine de soja devrait atteindre tout de même des records historiques proches des 230 millions de tonnes. La consommation locale et internationale devrait pouvoir se satisfaire de cet approvisionnement sur le moyen terme.

Ainsi, le tourteau de soja délivré Montoir se replie en direction de ses plus bas de campagne à 362 €/t sur son contrat spot. Pour conclure, il sera intéressant de suivre la semaine prochaine la nouvelle publication de l’Association nationale des transformateurs d’oléagineux (Nopa) sur les chiffres de trituration aux États-Unis.

À suivre : évolution de la parité eurodollar ; décisions géopolitiques autour des différentes taxes douanières aux États-Unis ; avancée de la récolte de soja au Brésil ; évolution des conditions de cultures en Amérique du Sud ; avancée des semis de maïs au Brésil ; conditions de cultures sorties d’hiver en hémisphère Nord ; rapport Nopa trituration aux États-Unis ; USDA forum agriculture : Intension de semis de maïs et de soja 2025 aux États-Unis.

(1) Argus Media, société spécialisée dans le suivi des marchés des matières premières, nous livre son analyse agricole hebdomadaire.