Le colza était jusqu’à présent porté par une production mondiale estimée à 85 millions de tonnes (Mt), soit une baisse de 7 % par rapport à la campagne de commercialisation de 2023-2024. Cela est en partie dû à une production européenne décevante. « Nous l’estimons à 17,2 millions de tonnes alors qu’habituellement elle oscille entre 19 et 20 millions de tonnes, voire 21 millions de tonnes les très bonnes campagnes », précise Clément Gautier, analyste de marché chez Horizon Soft Commodities. Les prix ont donc été sur une tendance haussière de septembre à décembre.

Ce contexte a imposé à l’industrie d’importer pour tenir la cadence de trituration, qui se calque en fonction des mouvements des huiles végétales. « Pour cela, elle a absorbé une partie du marché domestique et de la marchandise ukrainienne », informe Clément Gautier. La Coopération Agricole métiers du grain complète : « Les exportations canadiennes sont très bonnes cette année, meilleures que les années précédentes, notamment à destination de l’Union européenne (UE). » Depuis, des flux australiens sont aussi arrivés en Europe et il y a donc maintenant suffisamment de graines sur le marché.

Tensions internationales

Les huiles végétales ont de plus « corrigé » compte tenu du recul des cours du pétrole mais aussi de la disponibilité des récoltes de soja sud-américaines, notamment brésiliennes. « Tout cela pousse l’industrie à triturer sur un niveau correct désormais », juge l’analyste. Quant à l’annonce la semaine dernière par Donald Trump de la mise en place de taxe de 25 % sur les importations canadiennes de canola, elle a créé un fléchissement des cours du colza qui depuis « se récupèrent un peu ». « On ne sait pas comment les flux vont évoluer mais ils pourraient notamment être réorientés vers l’UE », ajoute La Coopération Agricole métiers du grain.

La reprise du trafic sur la Moselle prévue le 31 janvier recrée en outre un peu de pression sur le marché. Un bateau de marchandise venant de l’Allemagne avait en effet endommagé l’une des portes de l’écluse de Müden sur la Moselle, en Allemagne. Cela a engendré l’interruption du trafic international dans les deux sens de navigation. Voies navigables de France précise que « plus de 4 000 bateaux et 4 à 5 millions de tonnes de marchandises » y transitent chaque année en France. « Or, une bonne partie du colza de l’est de la France passe par ce flux pour être acheminé vers les unités de trituration nord-communautaires, notamment allemandes », indique Clément Gautier. Pour mémoire, le reste du colza français est consommé sur le territoire national et l’exportation via Rouen reste très limité : il s’agit d’avantage d’un port d’importation pour des ajustements dans certaines usines.

Le marché retrouve donc un certain équilibre avec une baisse du cours de la graine oléagineuse. « Depuis le début de l’année, il évolue autour des 500 €/t pour l’échéance de mai. Il reste malgré tout sur des niveaux supérieurs à l’an dernier compte tenu de la moindre quantité de graines et de la bonne demande », souligne enfin l’analyste.