« Beaucoup d’agriculteurs vendent leurs produits en définissant le prix au doigt mouillé, regrette Christophe Osmont, référent des questions sociales à la Fédération nationale de l’agriculture biologique (Fnab). Bien sûr, on ne peut pas s’extraire du marché, mais il est important de reprendre la maîtrise de ces questions. » Raison pour laquelle la Fnab a développé un outil (1) pour calculer ses coûts de revient par produit.

Définir une rémunération
« Cet outil part du commencement : le revenu du producteur », souligne Christophe Osmont, également éleveur dans la Manche et utilisateur de ce dernier. Il s’agit pour chacun d’évaluer à combien il estime devoir être payé. « On peut choisir un forfait mais une rémunération horaire me paraît plus adaptée, pour nous permettre aussi de mesurer notre temps de travail. »
Il complète : « En général, les agriculteurs imaginent une rémunération trop basse par rapport à ce que le travail demande en expertise, en formation… Et puis, cela doit prendre en compte la capacité de prendre des vacances. » Ensuite, l’enjeu est de mesurer le nombre d’heures passées sur chaque produit. « Cela demande de noter toutes les activités au jour le jour pendant un mois, par exemple, détaille l’éleveur. C’est contraignant mais utile » pour ensuite ventiler la rémunération sur chaque produit.
Valeur de remplacement du matériel
« Il faut donner une valeur de remplacement à chaque outil de production. » Pour le matériel ou pour le foncier, on définit un nombre prévisionnel d’années d’utilisation, puis on intègre cette quote-part au prix de revient. « Ce n’est pas comme dans la comptabilité, où un tracteur vieux de 20 ans n’a plus de valeur, détaille Christophe Osmont. Ici, on lui attribue une valeur de remplacement, parce qu’il faudra en acheter un autre s’il ne démarre pas. » Pour le foncier, il faut prendre en compte un coût équivalent au fermage, même pour les terrains en propriété.
Attention, la main-d’œuvre non rémunérée doit elle aussi avoir une valeur de remplacement. « Parce que cet enfant ou ce parent peut ne pas être disponible et doit pouvoir être remplacé sans risque par un salarié. Le coût de son travail doit donc être intégré dans le coût de revient pour faire face à tout coup dur. »
Des clés de répartition
L’étape suivante est de prendre en compte la totalité des charges, y compris celles du matériel ou du foncier déjà amorti ou payé. On additionne les assurances, les carburants, les intrants et on retranche les subventions.
Ensuite, l’ensemble de ces charges est réparti par atelier ou par produit selon une ou des clés de répartition : temps de travail, valeur ajoutée, surface utilisée… « En affectant les différentes charges aux différents ateliers, cela permet d’aller beaucoup plus loin dans l’analyse que les outils de comptabilité. Et l’intérêt de cet outil, c’est qu’il permet d’affecter toutes les charges », témoigne Christophe Osmont.
On divise alors l’ensemble de ces charges par la quantité de chaque produit pour obtenir le prix de revient.
Intégrer une par de risque
Afin d’intégrer les risques au prix de revient, il convient d’ajouter une marge de sécurité. « Il peut s’agir de l’aléa climatique ou de l’aléa de stockage », énumère l’expert. Un risque, notamment climatique, qui est donc différent en fonction des productions, mais que ce dernier calibre de 2 à 10 %. « Par exemple, entre la tomate et le lait, on a moins de risque de perte d’une année de production dans le lait. »
Il est enfin conseillé d’ajouter une marge de sécurité (« environ 5 % ») qui permet de dégager la trésorerie nécessaire à la couverture du cycle d’exploitation. La dernière étape du calcul du prix de revient est l’ajout de la TVA pour déterminer le prix de vente.
(1) L’outil Laizeau-Fnab (du nom de l’inventeur de cette solution) est accessible à tous après une formation de 2,5 jours qui permet de maîtriser cet outil et d’avoir une réflexion individuelle et collective.