L’histoire

Le GFA du Plateau avait donné à bail à long terme à Olivier, un vaste domaine agricole situé au cœur de la Beauce qu’il avait mis à la disposition d’une société civile d’exploitation agricole (SCEA). Elle était constituée entre ses parents, un oncle et lui-même. Après plusieurs années de mise en valeur des terres, Olivier décédait en laissant à sa succession son épouse et ses enfants.

Dans le cadre du règlement de la succession, un expert avait été désigné par le juge des référés pour déterminer la valeur des droits sociaux d’Olivier à la date de son décès. Il avait établi un rapport fixant la créance de la succession d’Olivier au titre du remboursement des droits qu’il détenait au sein de la SCEA à une certaine somme, en considérant que l’exploitation des terres allait être poursuivie par la société.

Le contentieux

Les héritiers d’Olivier avaient alors assigné les associés survivants de la société devant le tribunal judiciaire afin de voir fixer la créance de la succession de ce dernier au titre du remboursement de ses droits sociaux au sein de la SCEA. Ils s’étaient fondés sur le rapport de l’expert qui, pour évaluer les droits sociaux d’Olivier, se basait sur la pérennité de l’activité de la société. Il est vrai que selon l’article L. 411-37, la mise à disposition se poursuit en dépit du décès du preneur lorsque le bail est continué de plein droit au profit du conjoint ou des descendants du preneur décédé. Aussi, pour les héritiers d’Olivier, le décès de ce dernier était sans incidence sur la poursuite de l’activité de la société; la créance de sa succession devait être fixée en tenant compte de cette situation selon eux.

« Le rapport de l’expert évaluant les droits sociaux de l'associé décédé était entaché d’une erreur grossière »

Mais pour les associés survivants, le rapport de l’expert contenait une grave erreur. En effet, les statuts de la société prévoyaient que la continuation de la société dépendait de l’agrément des ayants droit de l’associé par les associés survivants. Aussi, en l’absence d’agrément des héritiers d’Olivier comme associés, la SCEA ne pouvait plus poursuivre l’exploitation des terres louées. De plus, le décès d’Olivier avait mis fin à la convention de mise à disposition et sa reconduction par ses héritiers n’était pas possible, puisqu’ils n’étaient pas associés au sein de la SCEA.

Cette analyse avait conduit les juges à écarter la demande des héritiers d’Olivier. La créance de la succession d’Olivier ne pouvait ainsi être déterminée en tenant compte de la pérennité de l’activité de la société. La Cour de cassation n’a pu que valider cette solution.

L’épilogue

Les héritiers d’Olivier devront revoir à la baisse leur demande de fixation de la créance de sa succession au titre du remboursement des droits sociaux qu’il détenait au sein de la SCEA. L’activité de cette dernière sur les terres louées ayant pris fin au décès du preneur. Tout au plus pourront-ils faire valoir leur droit à la continuation du bail consenti à leur auteur, en l’absence de résiliation demandée par le GFA.