« C’est valorisant de se dire que notre blé va servir à fabriquer une brioche Harrys ! », lance Stéphane Barreau. Installé à Baugy, dans le Cher, ce céréalier et son fils, Adrien, cultivent 260 ha, avec une rotation colza, tournesol, blé, orge, avoine, maïs et pois. 80 % de leurs blés partent en filière Harrys (groupe Barilla), collectés par Axéréal. En France, 640 agriculteurs fournissent quatre usines du groupe.
Les contrats tripartites (producteur, organisme stockeur et industriel) sont fondés sur les surfaces et non sur le tonnage. En cas de déclassement des grains, l’agriculteur touche quand même une prime. Convertie en tonne de blé, la prime s’élève à 18,5 €/t pour la filière, dont 15 €/t pour Stéphane et Adrien Barreau. En contrepartie, l’agriculteur s’engage à participer à un évènement Harrys en trois ans et à respecter un cahier des charges fondé sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre et la biodiversité.
Déjà engagé dans une filière bas carbone avec sa coopérative (Cultiv’up régénératif), Stéphane n’a pas eu besoin de bouleverser ses pratiques. « On n’interdit pas grand-chose. On pousse les bonnes pratiques », souligne Ophélie Hemmery, responsable de la filière du blé tendre chez Barilla.
Le blé (70 ha) représente moins de 45 % de la SAU, comme l’exige la charte, et le blé sur blé est proscrit. Les céréaliers ont opté pour la variété Celebrity parmi celles de blé proposées dans la démarche. « Ces variétés nous permettent de supprimer les régulateurs et de gagner un point d’IFT », détaille Stéphane. Les indicateurs de fréquence de traitements phytosanitaires (IFT) sont calculés par famille de produits, sans obligation.
OAD et modulation intraparcellaire
Pour diminuer l’empreinte carbone, les producteurs ont surtout travaillé la fertilisation. Ils apportent entre 160 et 200 unités d’azote selon les reliquats azotés. Le cahier des charges impose un outil d’aide à la décision (OAD) pour le dernier apport d’azote. Stéphane et Adrien utilisent Farmstar depuis 2018 pour les trois apports. Ils modulent en intraparcellaire, selon les cartes de rendement, le deuxième et troisième apport. « Cette technique nous permet de gagner 6 ou 7 unités à l'hectare, soit près de 10 €/ha en 2024, mais surtout elle garantit l’efficience de l’azote », précise Adrien, qui utilise également du phosphore et un inhibiteur d’azote (Nergetic), localisés sur la ligne de semis.
Simon Boulenger, animateur de la filière pour Axéréal, explique l’intérêt de ce produit. « Il réduit la lixiviation de l’azote nitrique et de l’azote sous forme de protoxyde d’azote, important dans les gaz à effet de serre. » Du côté de la biodiversité, le cahier des charges propose six options, les producteurs en choisissent trois.
Les Barreaux en ont mis plusieurs en place : des couverts diversifiés (vesce, trèfle, fenugrec, avoine, niger), une jachère mellifère (0,5 ha), des infrastructures agroécologiques (IAE) non productive à hauteur de 6,5 %, et beaucoup de haies. La ferme, pourtant implantée en Champagne berrichonne, compte plus de 12 km de haies bocagères. Le père et le fils ont sollicité une nouvelle aide à la plantation de Barilla pour une autre haie.
Avec des rendements de 64 q/ha, Stéphane et Adrien estiment que la prime Harrys couvre la hausse des charges (environ 50 €/ha) et permet de dégager un gain net de 50 €/ha.