« On a commencé l’apprentissage en 2012, à la suite de la demande d’une stagiaire. Aujourd’hui, elle fait partie de la famille », sourit Isabelle Deléglise, responsable de l’atelier des fromages de la ferme du Wint dans la région vallonnée du Boulonnais (Pas-de-Calais). « Quand [les apprentis] ont acquis des compétences pendant deux ans, l’objectif c’est de les garder ! »

Les trois frères et sœur exploitants ont l’habitude d’accueillir des apprentis en plus de leurs deux salariés à temps plein et à mi-temps. Agathe Planchez, en BTS Acse, est la cinquième à se former sur l’exploitation diversifiée. Ici, on produit cidre, jus, fromages et champignons de Paris en agriculture biologique et commercialisé en circuits courts.

« Tout est produit sur la ferme, c’est ce qui est intéressant ici », souligne Agathe, spécialisée en transformation avant de s’atteler à l’étiquetage des bouteilles de cidre. Ses journées sont partagées entre la production de fromages le matin et la préparation l’après-midi des commandes de l’atelier de cidre et jus ou du fromage. De temps en temps, elle participe aussi à la traite des 35 vaches le soir quand elle en a envie.

Ce lundi de février, Agathe et Isabelle s’attaquent de concert aux étiquetages des pâtes molles, le pavé du Wint, un brie camembert et un cabochon à la pâte orange, invention de la fromagère.

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« Il faut avoir confiance »

Pour s’assurer de la comptabilité des attentes entre l’apprenti et les agriculteurs du Wint, « les apprentis viennent une semaine ou 15 jours faire un essai. On s’engage pour deux ans, constate Isabelle Deléglise. Il faut avoir confiance en la personne. »

Pour sa formation, ce dernier a généralement besoin du bilan comptable, « surtout en BTS Acse, on parle de comptabilité tout le temps. Si on n’a pas les données de notre entreprise, on n’avance pas », témoigne Agathe, occupée à emballer le pavé du Wint. « Il y a des gens qui ne veulent pas montrer les chiffres de l’exploitation mais l’apprenti a un rapport à faire », ajoute Isabelle Deléglise.

Un compromis qui vaut le coup pour les exploitants. L’emploi d’un apprenti permet de bénéficier d’une aide économique d’environ 500 euros par mois pendant un an et d’être exonéré de charges patronales. Si les apprentis sont sur l’exploitation que la moitié du temps, ils représentent généralement un coût plus faible que des salariés (de 27 à 100 % du Smic selon l’âge et l’expérience).

Avoir des salariés, en particulier formés en apprentissage dans la ferme, permet de partir l’esprit serein en vacances. Ils « connaissent l’exploitation et ses habitudes », même s’il faut savoir être patient et déléguer, reconnaît l’ancienne salariée. Ce statut lui permet de « se mettre à leur place », une nécessité pour que l’entente se passe bien, assure Isabelle Deléglise.

Tous les apprentis ont un contrat de 35 heures. Mais les amplitudes horaires du secteur agricole peuvent parfois nécessiter des solutions alternatives pour respecter ces conditions. Agathe Planchez ne travaille pas le vendredi après-midi pour compenser ses heures de la semaine. « Si on est allés chercher des bêtes et qu’elle termine plus tard, la semaine d’après, elle partira plus tôt », affirme l’agricultrice pour qui « les horaires, ce sont les horaires ».

Alors que l’agriculture a besoin de bras, l’apprentissage favorise une transmission des savoirs. « Ce qui est chouette, c’est de montrer qu’il y a différents domaines dans l’agriculture, comme la transformation. Chaque agriculteur a un métier différent d’un autre, alors le fait de pouvoir les former nous-même, c’est bien. En général, ceux qui ont été en apprentissage sont restés sur la ferme. »