Trop, c’est trop ! Un ras-le-bol mêlé d’indignation agite en cette fin d’été la profession agricole dans le Cantal, dont les grands espaces sont prisés par les amateurs de rave-partys. « La communauté arc-en-ciel, composée d’environ 500 personnes, s’est installée depuis le début de juillet sur plusieurs dizaines d’hectares agricoles au Fau. À la fin de juillet, c’est la commune de Clavières qui a été prise d’assaut par plusieurs milliers de festivaliers venus participer à une rave-party d’une semaine », dénonce un communiqué de presse signé par la FDSEA et Jeunes Agriculteurs (JA) du Cantal.
« Une organisation parfaitement orchestrée »
« Ces occupations illégales sont le fruit d’une organisation clandestine parfaitement orchestrée, s’insurge Valentin Delbos, président de JA Cantal. Les squatteurs, équipés et préparés, repèrent les lieux à l’avance et s’installent en un temps record. Ils violent ainsi la propriété privée des agriculteurs, les privant de leur outil de travail, et occupent parfois des terres classées, telles que les zones Natura 2000. »
« Malgré les plaintes déposées, les autorités ont laissé ces événements se dérouler jusqu’à leur terme, au mépris total des droits des agriculteurs et de la protection de leurs terres, regrette le syndicaliste. Cette passivité est inacceptable alors que les manifestations d’agriculteurs pour la défense de leur revenu mobilisent les cars de CRS ! »
Pour le président de la FDSEA, Joël Piganiol, « il va falloir trouver des solutions efficaces pour enrayer un phénomène récurrent prenant de l’ampleur d’année en année. Les éleveurs ont besoin de leurs prairies pour les animaux. Non seulement elles sont inexploitables pendant le « séjour » des occupants illégaux, mais en plus, elles sont dévastées et jonchées de détritus dangereux pour les vaches. D’autres départements d’élevage voisins du nôtre sont également impactés par ces intrusions. Aucun dédommagement financier de l’État n’est à ce jour envisagé ! »
De la compensation partielle au dépôt de plainte
Sur la commune de Clavières, ce sont 20 hectares d’un îlot de 100 hectares consacrés à 93 vaches allaitantes de la coopérative d’estive du Mont Mouchet qui ont été squattés durant une semaine par 5 000 personnes venues de toute l’Europe. « Les vaches étaient prêtes à rentrer sur cette parcelle. Il a fallu revoir la gestion de notre pâturage tournant », explique Jean-Michel Vigier, président de la coopérative d’estive qui regroupe 14 éleveurs et 550 hectares d’estives.
« Des discussions ont pu s’engager dans le calme et aucun débordement n’a été à déplorer, souligne Gilles Bigot, le maire de la commune. Les pompiers bénévoles de tout le département ont été sur le pont 24 heures sur 24. » La coopérative a pu obtenir une légère compensation financière par les occupants pour les dégâts occasionnés aux prairies.
L’occupation illégale des terres sur la commune du Fau a, quant à elle, déclenché un double dépôt de plainte par le propriétaire et par l’exploitant fermier, qui n’a pas pu monter ses vaches en estive. Le préfet du Cantal n’a pas jugé bon de demander une expulsion des occupants illicites. L’affaire est entre les mains du tribunal administratif. « L’exploitant est responsable de ce qui se passe sur ses terres, rappelle Patrick Adam, président du syndicat de la propriété privée rurale du Cantal. La défense du droit de propriété — bafoué en l’espèce — est un sujet politique des plus préoccupants. »