À l’aube des années 2000, l’élevage de Marie-Pierre et Pascal Orvain dispose d’une unique nurserie individuelle de 13 places. En 2004, l’exploitation se dote d’une nurserie collective de 24 places pour les veaux sevrés ou en voie de l’être. Quatorze niches individuelles extérieures avec courette viennent s’additionner en 2010, pour « faire tampon ». Mais l’installation ne convainc pas. « C’est propice au mal de dos, relève Marie-Pierre. Sans compter la paille humide, le manque de lumière et le fait de travailler dehors en toutes saisons. »
Problème d’orientation
En 2014, les éleveurs se lancent dans la construction d’une nurserie mixte, individuelle et collective, de 32 places pour « ramener du confort de travail » et réduire la pression au niveau des places disponibles. « Les niches sont depuis utilisées pour les veaux mâles vendus à 15 jours, indique Pierre-Luc Orvain, le fils de Pascal et Marie-Pierre. Les marchands de veaux n’entrent pas dans les nurseries. Les futurs bœufs sont élevés avec les femelles de renouvellement. »
Les trois nurseries fermées sont en ventilation dynamique par dépression. « L’orientation des bâtiments n’est pas optimale pour assurer une bonne circulation de l’air, justifie Jean-Michel Cuminet, vétérinaire conseil chez Littoral Normand. En ventilation statique, il faudrait que le long pan soit perpendiculaire aux vents dominants, ce qui n’est pas le cas ici. » Qui plus est, les trois logis sont très rapprochés et les deux plus anciennes nurseries sont accolées à l’étable des vaches laitières, avec une toiture monopente. Le choix du dynamique s’est donc imposé de lui-même.
Tout vide ou tout plein
Les entrées d’air sont fixes, dans les deux nurseries accolées à l’étable. Plus récente, la nurserie mixte est, quant à elle, équipée de trappes de régulation automatiques : « Le nec plus ultra pour gérer les flux d’air », souligne le vétérinaire.
Les nurseries fonctionnent le plus souvent en « tout vide » ou « tout plein ». Le taux de remplissage varie peu. Ainsi, le réglage de la ventilation dépend plus « de l’âge des veaux et de la saison » que des effectifs présents, note Pierre-Luc, qui souligne l’importance de maintenir une bonne ventilation en hiver « pour chasser l’humidité et l’ammoniac ».
Le fait d’attendre la sortie de tous les veaux pour introduire de nouveaux pensionnaires présente un double avantage : limiter la différence d’âge entre les animaux hébergés sous le même toit et opérer un vide sanitaire entre les lots. « Une fois vidée, la nurserie est curée et lavée au jet haute pression, décrit Marie-Pierre. L’étape de désinfection n’est pas systématique », bien que cela aiderait à « détruire le microbisme ambiant », conseille Jean-Michel Cuminet.
Un système amovible
À la naissance, les veaux peuvent rejoindre la nurserie individuelle de 13 places. Ils sont alors placés dans des cases surélevées, sur paille et caillebotis de bois. L’alimentation et l’abreuvement sont gérés au seau. Une botte de paille est stockée sur place. « Des panneaux en plastique sont installés au-dessus des cases en hiver, pour garder les plus jeunes au chaud », précise Marie-Pierre. Le plafond provisoire, « facile d’entretien », recouvre les deux tiers de la case.
Après 8 semaines, les veaux sont transférés dans la nurserie collective et ses cases paillées traditionnelles.
Si la nurserie individuelle est en cours de lot ou de lavage, les nouveau-nés peuvent aussi investir la nurserie mixte. Elle est composée de deux grandes aires paillées, avec une contremarche en béton et des cornadis. L’espace peut être divisé en 32 cases individuelles, disposant chacune d’une auge et d’un abreuvoir automatique. Les panneaux en plastique alvéolé séparant les cases peuvent progressivement être retirés pour former des cases collectives. Ce format « à la carte » facilite le travail et évite aux veaux sevrés « le stress lié à un changement de bâtiment », se réjouit l’exploitante.
Dans cette nurserie moderne, la paille, utilisée pour l’alimentation et la litière, est stockée sur un couloir surélevé au milieu des deux aires paillées. Le premier curage est réalisé lorsque les premières cases collectives se forment, puis toutes les 2 semaines.
Quelle que soit leur affectation, nurserie individuelle ou mixte, les veaux passent huit semaines en solo, « pour un suivi personnalisé ». S’ils ne sont pas déjà sevrés, ils le seront peu de temps après en cases collectives.
Ce fonctionnement pour l’élevage des veaux satisfait les producteurs. « Les nurseries sont regroupées à proximité de la laiterie », indique Marie-Pierre, qui parvient à gérer l’ensemble des veaux à elle seule. Ces derniers grandissent normalement et « atteignent un poids au sevrage d’environ 200 kg », estime Pierre-Luc. De quoi poser les bases d’un premier vêlage à 26 mois. « Nous avons quelques soucis sur la qualité du colostrum, nous y travaillons, mais le soin accordé à leur alimentation et leur logement permet de les préserver », conclut l’éleveuse. Avec, à la clé, un faible taux de mortalité.