La campagne de 2023-2024 s’est caractérisée par des précipitations importantes sur une large partie de la France, perturbant notamment les semis d’automne. Ces derniers n’ont pas toujours été réalisés dans de bonnes conditions. Les densités de levée plus ou moins élevées ont favorisé, dans ce dernier cas, l’installation des adventices.
Sur cette campagne, on observe ainsi « une tendance à l’augmentation du nombre de parcelles avec présence de graminées non maîtrisées. Le labour est un levier agronomique efficace pour limiter leur infestation dans la culture suivante et enfouir les mauvaises graines tombées au sol », indique Frédéric Moigny, conseiller en agronomie à la chambre d’agriculture du Puy-de-Dôme.
Pour lui, « tout n’est pas blanc ou noir » avec le labour. « Il a un effet négatif ponctuel sur les vers de terre, mais un labour tous les cinq ans ne va pas tous les tuer. Il permet de réduire l’usage de phytos, de réchauffer et ressuyer un sol plus vite au printemps, mais accentue aussi les risques de ruissellement dans les parcelles en pentes », résume le conseiller.
Labourer ou pas, ces deux modèles ne devraient pas s’opposer pour Frédéric Moigny, qui préfère une approche pragmatique des systèmes : s’adapter en permanence, en fonction de la météo, des cultures que l’on souhaite implanter, des résistances aux herbicides…
Se fixer des règles de décisions
Le conseiller invite à se fixer des règles de décisions comme ne labourer que si nécessaire plutôt que d’intervenir systématiquement pour une culture donnée, et à garder le plus de solutions possibles : rotations longues, alternances de travail et de non-travail du sol…
Le rôle du labour est avant tout de maîtriser les adventices, estime-t-il, plutôt que de restructurer un sol. Pour cela, un décompacteur ou un fissurateur est plus adapté. « Une moissonneuse qui passe par exemple sur un sol humide entraîne un tassement à 40-60 cm, une profondeur que le labour n’atteindra pas », justifie-t-il. Il faut faire preuve de patience, et attendre que le sol soit bien ressuyé en profondeur avant d’intervenir. Il insiste : « On a eu beaucoup d’eau cette année, il faut y être attentif pour éviter de faire des semelles de labour. »
Par le retournement de la terre, la matière organique est répartie sur la profondeur du labour, « c’est pourquoi il faut la limiter au maximum à 20 cm », ajoute Frédéric Moigny. Il est possible de compenser cet effet, par l’enfouissement des résidus de récolte, par des couverts, voire par l’apport de composts de déchets verts exogènes ou d’effluents organiques s’ils sont accessibles à proximité.
Le labour est aussi un levier de gestion des résidus qui peuvent par exemple gêner le semis d’un colza lorsqu’ils sont importants. Le risque lié aux attaques de limaces est alors plus faible. « Avec le printemps humide, on a vu des situations en non-labour où les attaques de limaces étaient phénoménales », rapporte le conseiller.