C’est à l’occasion d’une formation à l’agriculture biologique (AB) au CFPPA du Rheu, il y a vingt-cinq ans, que Christian Mogis a rencontré Bernard Rolland, ingénieur de recherche à l’Inrae du Rheu. Les travaux pratiques avaient lieu au Gaec de la Mandardière, l’exploitation de Christian, à Pacé près de Rennes. L’Inra cherchait alors un site à proximité du Rheu pour accueillir sa première plateforme de sélection de variétés lignées de blé tendre pour l’AB. Il est apparu « comme une évidence » de solliciter la famille Mogis.

À l’automne 2000, les 80 microparcelles de la plateforme ont été semées. Un quart de siècle plus tard, la plateforme est toujours là et s’est agrandie : elle compte désormais 900 microparcelles, ce qui en fait l’une des plus grandes plateformes d’essais bio en France. « En tant qu’agriculteur, c’est passionnant de voir grandir toutes ces variétés. Avant cela, j’ignorais qu’il fallait treize ans pour en inscrire une. Les variétés, je les voyais sur un catalogue, rapporte Christian Mogis. C’est aussi enrichissant d’avoir un partenariat avec des scientifiques, cela permet de sortir du contexte de la ferme. »

En bio depuis 1993

La ferme en polyculture-élevage de Christian Mogis et de son épouse Cécile est en bio depuis 1993. « À l’époque, ce n’était pas très courant, raconte l’agriculteur. Mais nous n’étions pas bien dans notre système, en particulier lorsqu’il fallait sortir le pulvérisateur. » Motivé par les premières aides bio en 1992, qui se sont accompagnées de formations, le couple d’éleveur a décidé de relever le défi de convertir leur exploitation, qui compte aujourd’hui 75 vaches laitières et une surface de 90 ha. « On s’est dit qu’on allait essayer pendant deux ou trois ans, et que l’on continuerait si cela suivait financièrement », explique Christian Mogis.

La conversion a nécessité un changement de pratiques. « La ferme était relativement intensive, avec beaucoup d’animaux, des prairies fertilisées avec des engrais azotés, du maïs ensilage, décrit l’agriculteur. On cultivait peu de céréales à paille, donc on utilisait peu de produits phyto. » La sole de maïs a été réduite au profit de prairies qui, en plus des graminées, ont été enrichies de légumineuses. Si la différence de rendement est marquée entre le maïs bio et le conventionnel, elle l’est moins sur les surfaces fourragères. « On parvient à conserver des prairies pendant quatre ou cinq ans qui produisent jusqu’à 9 ou 10 tonnes de matières sèches par hectare », explique Christian Mogis.

Les Mogis cultivent une dizaine d’hectares de céréales, qui sont valorisées via leur groupement de producteurs, les Greniers bio d’Armorique. Cette année, ils ont implanté une variété de blé biscuitier, Gwastell (Agri-Obtentions). « C’est une variété qu’on souhaite développer au sein du groupement car elle est multi-usage et ouvre plusieurs débouchés : on peut en faire des biscuits, du pain comme du malt pour faire de la bière blanche. »