Dans le persil monté à graine, Dorian Sagot observe un aleo-thrips, un insecte auxiliaire qui l’aide dans la lutte contre les thrips sur oignon. Installé à Rouvres-Saint-Jean, au nord du Loiret, avec son père Alain, et son voisin Gilles Desforges, ce jeune trentenaire cultive du persil porte-graine associé à de la féverole, elle aussi en porte-graine. Depuis 2020, la ferme des Trois Roviers est passée en agriculture de conservation, un challenge pour une rotation très diversifiée, qui compte des cultures industrielles comme des oignons ou des betteraves.
Le persil se sème classiquement en août et la graine se récolte un an après. « Nous avons commencé par deux années avec du persil seul. Cela nécessitait beaucoup d’irrigation, 4 tours de 20 mm. Nous avons essayé de l’associer avec de la féverole de printemps », explique Dorian Sagot. Le persil étant sensible à la gelée, il est semé à la fin de mars. Le persil n’a pas besoin d’irrigation à cette époque, mais les rendements de la féverole sont en retrait, autour de 10 q/ha, contre une trentaine semée seule. « La féverole est présente avant tout pour diminuer les intrants du persil, mais si on peut produire quelques quintaux, c’est quand même appréciable », ajoute Gilles Desforges.
Après trois ans d’essais, les Beaucerons remplacent la féverole de printemps par de la féverole d’hiver. C’est une réussite. Depuis deux ans, les quintaux sont au rendez-vous, autour de 50 q/ha.
Un itinéraire bien réfléchi
En novembre, la féverole est implantée au semoir à céréale à 8 cm de profondeur, sans travail du sol, après la destruction d’un couvert de moutarde et de phacélie. Elle est semée peu dense pour éviter les maladies (35 pieds/m²). Un désherbage d’automne est réalisé.
Le persil est ensuite semé à la fin de mars au semoir monograine, plutôt dense (400 000 graines/ha), avec un interrang de 50 cm. Les agriculteurs ont équipé un semoir Monosem NG + avec des disques plus lourds que ceux d’origine, des chasses débris et un contrôleur de semis.
Un tour d’eau est apporté si besoin, quand la féverole est en fleur. Un ou deux fongicides peuvent être appliqués. Les trois céréaliers apportent également de l’Eco amino pour les oligo-éléments, de la mélasse de betterave, et des macérations d’ortie-consoude (5 l/ha) pour booster le persil quand celui-ci est en feuille.
« Le désherbage est complexe, car quand le persil est assez résistant pour être traité, la féverole est en fleur. Donc depuis l’année dernière, nous passons la houe rotative au printemps et après la récolte de la féverole », indique Dorian. La moissonneuse-batteuse passe au début d'août, pour récolter la féverole, sans abîmer le persil qui est encore petit mais robuste. Il restera encore un an en terre. Sans travail du sol, les céréaliers doivent faire face à quelques ronds de mulots… Les abeilles, quant à elles, apportées par un apiculteur, papillonnent dans les fleurs de persil.
Outre les bons rendements en persil, cet itinéraire technique permet de diminuer les intrants : l’irrigation est divisée par quatre (soit 160 €/ha d’économie) et les quantités d’azote (urée) par deux, en fonction des reliquats (soit 60 €/ha d’économie). « Une année, nous n’avons rien apporté au persil, la féverole ayant laissé assez d’azote. En général, on diminue la dose de 30 à 50 % des 120 unités habituelles grâce à la féverole », précise Dorian. Le semis direct baisse les charges de mécanisation de 60 €/ ha environ.
En 2024, les rendements de persil (12 q/ha net) ont dégagé 3 500 € de chiffre d’affaires, avec peu de charge. La féverole a été valorisée à 340 €/t.