Le défi le plus important qui attend le secteur agricole sera la question environnementale, selon les consommateurs. Il diffère de celui des agriculteurs, qui placent la main-d’œuvre à la tête des enjeux de la filière. C’est le résultat d’une étude comparée publiée le lundi 30 octobre 2023 et menée par l’institut de sondage Ipsos auprès de 250 agriculteurs de différentes filières (élevage, grandes cultures, viticulture, maraîchage, arboriculture) et un millier de consommateurs.

Les préoccupations des consommateurs sur le secteur agricole sont d’abord environnementales avant d’être économiques, observe l’Ipsos. Ainsi, 47 % placent les événements climatiques à la tête des enjeux auxquels devra faire face l’agriculture, devant la sécheresse (46 %) et l’accès à l’eau (33 %). Les deux derniers étant des conséquences directes du réchauffement climatique, les consommateurs adhèrent, unanimes, au défi environnemental.

La main-d’œuvre au cœur des préoccupations des professionnels

Au contraire, les agriculteurs sont d’abord préoccupés par la question de la main-d’œuvre et la baisse du nombre d’agriculteurs (37 % versus 21 % du côté des consommateurs), enjeu économique qui secoue la filière alors que les professionnels peinent à recruter. Les événements climatiques viennent en seconde position (32 % contre 47 %), devant l’intensification des épisodes de sécheresse (28 % contre 46 %).

Au niveau économique, quatre agriculteurs sur dix déplorent des revenus toujours plus réduits au profit des autres acteurs de la filière, contre trois consommateurs sur dix. Les professionnels s’inquiètent également plus que les consommateurs des coûts de productions (32 % contre 12 %) et de la concurrence déloyale d’autres pays (40 % contre 31 %). Des différences qui pourraient s’expliquer par la méconnaissance des difficultés économiques des agriculteurs par la population française.

Des consommateurs confiants envers l’agriculture

Si l’avis des consommateurs diffère de celui des agriculteurs, la grande majorité (73 %) de la population pense tout de même que les subventions publiques sont nécessaires pour soutenir les agriculteurs français, et plus d’un tiers aimerait que le gouvernement mette en place des subventions pour les aider financièrement. « Un Français sur cinq attend du gouvernement mais aussi des acteurs de la grande distribution qu’ils valorisent le métier et garantissent une rémunération plus juste », indique l’Ipsos.

Ces derniers restent majoritairement favorables au métier d’agriculteurs. 60 % d’entre eux témoignent d’une confiance envers les agriculteurs conventionnels, et près des trois quarts envers l’agriculture biologique. La population française reste partagée sur la production et l’exportation des produits agricoles. « 47 % estiment que la France doit conserver sa capacité de production et continuer d’en exporter une partie, quand 53 % pensent qu’elle doit la réduire en réduisant son utilisation de fertilisants ou de produits phytosanitaires », souligne l’Ipsos.

Si les consommateurs mettent en avant les enjeux environnementaux auquel doivent faire face les agriculteurs, ils ne sont « pas encore tout à fait prêts à se confronter à l’enjeu financier au cœur de la question », indique l’Ipsos. En effet, un peu plus de la moitié (54 %) se dit prêt à dépenser plus pour acheter des fruits et légumes biologiques, tandis que 46 % disent acheter les fruits et légumes le moins chers, qu’ils soient biologiques ou non.

« Dans le contexte d’une inflation qui reste la préoccupation n° 1 des Français, le défi le plus complexe est la tension entre une agriculture productiviste qui permet de nourrir la population à moindre coût et une agriculture raisonnée qui implique de dépenser plus », observe Nicolas Vogel, chef de groupe chez Ipsos Agriculture.