Dans la perspective de l’arrêt dans les prochains mois du fludioxonil, un fongicide classé comme perturbateur endocrinien par l’Efsa, différentes pistes sont testées afin de maintenir un bon état de conservation des pommes en chambre froide. Le centre technique de la Morinière (Indre-et-Loire), spécialisé en arboriculture, teste beaucoup de produits en prérécolte pour contenir les pourritures de type gloeosporioses (Neofabraea vagabunda).
L’évaluation de produits de biocontrôle ou des produits alternatifs revêt une importance particulière dans ce contexte. « Nous comparons l’efficacité à celle du fludioxonil + captane. Mais, pour l’instant, aucun produit n’atteint ses performances. Nous allons sûrement devoir changer de référence », indique Julien Renaud, technicien spécialisé en conservation des pommes. Les traitements sont positionnés 4 à 6 semaines avant la récolte, en fonction des pluies contaminatrices. La cueillette se fait à une maturité avancée (amidon > 7), puis les pommes sont conservées en froid normal sous bâche, à 3°C.
Les produits de biocontrôle, à base de micro-organismes ou d’extraits végétaux, montrent une efficacité́ très variable d’une année à̀ l’autre, en raison de leur sensibilité au lessivage. Ils doivent être renouvelés après chaque cumul de 20 mm de pluie.
Produits à base minérale
Ceux à base minérale, comme le soufre ou le cuivre, sont globalement plus efficaces. C’est le cas du polysulfure de calcium (Curatio) et l’argile sulfuré avec de l’extrait de prêle. Ils se démarquent depuis plusieurs années, sur les variétés cultivées en agriculture biologique ou même parfois sur des variétés de fin de saison produites en agriculture conventionnelle. Dans plusieurs essais, le Curatio, renouvelé tous les 20 mm de précipitations, montre un effet bénéfique, même s’il n’apporte pas la même protection qu’un fongicide de synthèse. Néanmoins, il n’est pas homologué pour cet usage et l’argile sulfurée n’est pas homologuée en France.
« Des produits comme le Noripro, composé de polymères siliconés, en “effet barrière” utilisés habituellement contre les insectes, sont plutôt encourageants », note Julien Renaud. D’autres produits sont à confirmer sur le long terme : le phosphonate de potassium (Etonan), l’hydroxyde de cuivre (Funguran) ou l’oxychlorure de cuivre + zinc + manganèse (Kendal TE). Les bonnes pratiques recommandent une application alternée des fongicides au verger afin d’éviter les risques d’apparitions de résistances, courants avec les champignons.
La thermothérapie, efficace mais…
Une autre solution pour conserver longtemps les pommes est la thermothérapie. Les pommes sont plongées dans un bain d’eau chaude à 49°C pendant deux minutes.
Cette technique s’est développée dans quelques stations fruitières ces dernières années grâce à l’arrivée sur le marché de machines industrielles avec des débits de traitements adaptés à leur production. L’entreprise Crovara (Vaucluse), par exemple, a conçu une machine de douchage à l’eau chaude. Cette solution est très efficace (50 à 90 %), voire plus que la chimie pour certaines variétés. Une différence d’efficacité apparaît selon la position des fruits : en haut, plus près de la douche, les pommes sont mieux protégées.
En revanche, cette technique est complexe à mettre en œuvre, elle nécessite beaucoup d’énergie et de temps. Et sur certaines variétés (Swing®, Delcored Divine®, Daliclass®, Jazz®, Tentation®…), une phytotoxicité apparaît sous forme de tâches lenticellaires (sur la peau), de façon plus ou moins marquée selon les conditions d’application. Par exemple, sur Divine® Delcored (agriculture biologique), l’efficacité est de 70 %, contre 21,6 % pour le Blossom Protect® (fongicide composé de levures) et 23,7 % du Curatio®, mais une phytotoxicité apparaît.
Globalement, une cueillette tardive, les blessures ou une forte pluviométrie automnale favorisent le gloeosporiose.