Sur le marché des céréales, peu d’informations fondamentales sont actuellement en mesure d’insuffler une dynamique aux prix, qui restent sous l’influence du taux de change euro/dollar et des informations météorologiques.
En blé, le rendu Rouen ancienne récolte est relativement stable depuis la semaine dernière, autour de 155 €/t. La poursuite de l’appréciation de l’euro continue de soulever des inquiétudes pour la compétitivité européenne à l’exportation. C’est d’autant plus critique pour la campagne à venir (2017-18) que les blés de la mer Noire affichent une grande agressivité sur les mois d’été et d’automne. Sur la base des prix actuels, la Russie pourrait ainsi effectuer un démarrage en trombe, alimenté par des stocks hérités de 2016-17 très élevés. Le risque de voir le géant russe prendre des parts de marchés sur les débouchés export de l’UE est accru par le conflit larvé qui n’en finit pas avec la Turquie. Bien que le gouvernement turc s’en défende, il semble que les autorités de ce pays limitent à 20 ou 25 % la part de blé russe dans les importations réalisées par les industriels, en rétorsion à des mesures compliquant l’accès du marché russe à certains fruits et légumes turcs. Si le bras de fer devait se poursuivre, cela réduirait fortement le potentiel d’exportation de la Russie vers l’un de ses débouchés majeurs, et l’inciterait à pousser les gaz vers d’autres destinations, potentiellement au détriment de l’UE.
Du côté de la météo, les pluies qui sont tombées en France ces dernières semaines ont stabilisé la situation dans un grand nombre de régions souffrant du sec, mais il faudra encore de l’eau dans certains secteurs pour ne pas voir les rendements se dégrader plus encore. S’ajoutent désormais à cela les interrogations sur l’amplitude de la vague de chaleur actuelle et les impacts que cela aura sur les blés. Aux États-Unis, c’est l’excès d’eau qui pourrait être préjudiciable aux blés d’hiver, notamment pour la qualité, alors que la récolte approche à grand pas.
Le prix de l’orge ne fait pas de bulles
Au cours de la semaine passée, le prix de l’orge fourragère rendu Rouen s’est effrité à 139 €/t en nouvelle récolte (–1 €/t), subissant la même lourdeur que le blé tendre et les affres du taux de change. Les prix brassicoles ont également reculé. En Fob Creil, l’orge brassicole d’hiver est cotée à 154 €/t et celle de printemps à 184 €/t, cédant toutes deux 4 €/t par rapport à la semaine passée. Les récentes pluies ont atténué les craintes même si les orges d’hiver ne devraient pas sortir indemnes de la séquence de sécheresse ponctuée par la récente vague de froid printanière sur des cultures déjà avancées. Les disponibilités continuent toutefois d’être attendues en forte hausse par rapport à l’an passé.
Compte à rebours argentin en maïs
En maïs, les farmers US ont mis les bouchées doubles et ont rattrapé le retard qu’avaient pris les semis du fait des conditions humides. Avec 84 % des semis effectués, ils sont désormais dans la moyenne des années passées. En Argentine, les routes inondées et les sols gorgés d’eau continuent en revanche de ralentir la récolte dans des zones clés. Cela retarde l’arrivée du maïs argentin sur le marché mondial et, de ce fait, le potentiel impact baissier de cette dernière.
En France, les semis sont terminés et les pluies de la semaine dernière ont été bénéfiques aux cultures, qui profitent maintenant de températures estivales. Dans ce contexte, les positions n’ont guère bougé pour l’ensemble des cours mondiaux, avec un Fob Bordeaux qui continue toutefois à s’affaisser (–3 €/t) à 159 €/t.
Le prix du colza recule encore sous la pression de l’euro
La situation est stable cette semaine pour les colzas en France et en Europe. Bien que le temps soit actuellement exceptionnellement chaud dans une grande partie ouest de l’UE, l’état des cultures n’en est pas préoccupant pour autant. Un temps plus frais et humide est en effet attendu pour le milieu de la semaine prochaine. Dans le centre et l’est de l’UE, le temps est plus proche des normes de saison. Les prix des colzas français exprimés en dollars sont encore une fois quasi stables, mais ils diminuent exprimés en euros cette semaine. En effet, le prix du colza sur Euronext (contrat d’août) recule de 3 €/t à presque 356,75 €/t. Le colza Fob Moselle recule de 2 €/t (récolte 2017) et le rendu Rouen de 3 €/t.
Au Canada, le prix du canola à Winnipeg diminue très légèrement en dollars canadiens, mais le jeu des taux de change le fait remonter de 5 dollars US/t sur le rapproché. La situation s’est améliorée cette semaine et les semis de canola ont bien progressé. Les précipitations ont en effet été modérées et le temps plus chaud et plus sec. Les agriculteurs ont notamment pu ensemencer 85 à 90 % de leurs champs dans le Manitoba et 60 % environ dans le Saskatchewan. Dans cette province canadienne, selon le gouvernement local, environ 5 % des surfaces ne pourront pas être ensemencées, en raison de l’excès d’humidité. En Alberta, la situation s’est aussi normalisée durant la semaine. Ainsi, la surface de canola au Canada pourrait progresser, mais pas autant qu’initialement prévu.
Les cours de la graine de tournesol sont en recul cette semaine (–5 €/t à Saint-Nazaire), les conditions d’implantation ayant été plutôt correctes sur l’ouest de l’UE malgré quelques dégâts localement (sec en Espagne, gel en France). Les conditions climatiques sont plutôt bonnes dans le centre et l’ouest de l’UE (notamment en Hongrie, Roumanie et Bulgarie).
Baisse du soja sur fond de semis US sans accroc
Les cours du soja à Chicago ont encore reculé cette semaine, perdant 2 $/t sur l’échéance de juillet. Les semis progressent bien, avec 53 % des intentions déjà réalisées au 21 mai (52 % en moyenne des cinq dernières années). Les ventes sur l’ancienne campagne ont ralenti, mais restent au-dessus de la moyenne sur la semaine du 11 au 18 mai. Il faut noter que le real brésilien a brusquement chuté ces derniers jours, passant de 0,329 dollar le 18 mai à 0,3 le 19 mai. Il est très légèrement remonté depuis. Cette forte variation pourrait entraîner une vague de ventes de la part des agriculteurs brésiliens, ces derniers percevant davantage en monnaie locale pour un cours mondial du soja quasi inchangé en dollars. Les brésiliens disposant encore de stocks conséquents, la concurrence pour l’exportation sur le marché mondial entre les deux géants américains devrait se renforcer durant les prochaines semaines. Si les conditions de cultures restent correctes aux USA, les prix devraient continuer un lent déclin sur l’été, les stocks de soja de fin de campagne étant prévus à un niveau historiquement haut.
Tourteaux : nouvelle chute des prix
Avec un marché pesant sur la graine de soja, et une récolte de soja argentine d’un très bon niveau (le ministère de l’Agriculture a relevé cette semaine son estimation à 58 Mt), le prix des tourteaux de soja a diminué cette semaine. Le tourteau de soja au Montoir recule de 8 €/t à seulement 316 €/t sur le rapproché, et le tourteau à Chicago perd 3 $/t à 336 $/t.
Le prix du pois fourrager départ Marne se stabilise à 211 €/t. En nouvelle récolte, le pois jaune est coté à 240 €/t rendu Rouen, en hausse de 5 €/t sur la semaine.
A SUIVRE : récolte de maïs en Argentine, avancée des semis de printemps aux USA et au Canada, pluies sur les blés US, conditions climatiques dans l’UE (fortes chaleurs et besoin de pluie), taux de change euro/dollar et real/dollar, conflit économique entre la Russie et la Turquie.