La loi Egalim 2 a permis de sanctuariser la part des matières premières agricoles dans les tarifs des produits alimentaires, mais la plupart des clauses de renégociations automatiques sont inapplicables, selon les sénateurs. Dans un rapport de la commission des affaires économiques, publié le 19 juillet 2022, ils soulignent également que « les hausses demandées au titre de l’évolution du prix du transport et de l’énergie ont dans l’ensemble été refusées ou acceptées de façon très réduite ».
La loi Egalim 2 doit « être adaptée à la période actuelle de renégociations commerciales permanentes », avancent les sénateurs. En l’état, ils considèrent cette loi « incomplète ».
Des clauses de révision des prix « bâclées »
La mise en œuvre des clauses de révision des prix dans les contrats entre industriels et distributeurs est « trop peu encadrée ». « La définition de ces clauses semble avoir été « bâclée ». Elles n’ont fait l’objet que d’une attention relative à la toute fin des négociations », signale le rapport. Seuls 20 % des contrats signés avant la fin de février 2022 comportent une telle clause, selon la DGCCRF, la direction générale de la concurrence, du commerce et de la répression des fraudes.
La question des clauses de révision des prix est un vrai problème, a insisté auprès de La France Agricole, le sénateur Daniel Gremillet, auteur du rapport avec sa collègue Anne-Catherine Loisier. « La plupart sont quasi inapplicables car elles se basent sur un délai de mise en œuvre de neuf mois — c’est-à-dire que la hausse résultant de l’activation de la clause ne s’applique que plus de neuf mois plus tard — et pour bon nombre il faut une augmentation de 50 % de la matière pour qu’elles soient activées. »
Définir un délai d’application plus court
Les sénateurs proposent donc de mieux encadrer la définition des clauses de révision automatique des prix dans les contrats, notamment en définissant un délai d’application une fois que la clause est enclenchée (par exemple un mois), en précisant « que le seuil de déclenchement ne peut être supérieur à un taux fixé par voie réglementaire » et que « la clause s’applique à chacune des matières premières agricoles entrant dans la composition du produit. »
Cette proposition nécessite de modifier le code du commerce, précisent les parlementaires.
Manque d’implication du gouvernement
Les sénateurs critiquent le « manque d’implication de la part du gouvernement dans le suivi des négociations commerciales » et la faiblesse de la charte d’engagement signée le 18 mars 2022 par tous les acteurs de la chaîne agroalimentaire. En effet, cette charte, dans laquelle industriels et distributeurs s’engagent à faciliter la réouverture des négociations, n’est pas contraignante.
Ils proposent qu’un tableau de suivi de l’avancée des négociations et renégociations commerciales soit établi par les services du ministère de l’Agriculture et transmis aux organes compétents du Parlement. « Les réunions du comité de suivi devraient à tout le moins permettre d’engager des discussions entre acteurs (y compris les pouvoirs publics) sur la base d’indicateurs fiables et objectifs », estiment les sénateurs.
D’ici à l’automne, ils entendent poursuivre leur travail de suivi de l’avancée des renégociations et également évaluer le titre 2 de la loi Egalim, concernant la séparation de la vente et du conseil, a fait savoir à La France Agricole, Daniel Gremillet.
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