Traitaleizh, c’est son nom. Inventé par deux Bretons, le système a pour objectif de réduire le poids porté par l’opérateur de traite. Il s’agit d’un bras articulé en inox qui supporte les éléments de traite d’une installation manuelle existante et qui suit l’opérateur lors du positionnement des manchons, mais également le mouvement des vaches. « Il se rapproche du bras humain pour porter la griffe », résume Michel Chevalier, l’un des concepteurs, éleveur laitier (55 VL) et de porcs (420 truies naisseur engraisseur) à Caro (Morbihan) sur une exploitation de 100 hectares avec trois salariés.
La recherche de solutions pour faciliter le travail
Amputé de son avant-bras gauche à la suite d’un accident avec une vis sans fin il y a 10 ans et appareillé, l’éleveur est particulièrement sensibilisé au confort de travail et à l’ergonomie. Il y a quatre ans, il a rencontré un peu par hasard, Yann Dobignard, un ingénieur en électro-mécanique salarié qui a depuis créé son propre bureau d’étude EYD expertise. De fil en aiguille, ils se sont trouvé une passion commune dans la recherche de solutions pour faciliter le travail.
« Avec l’agrandissemnt des exploitations et l’augmentation de la taille des troupeaux, je connais trop de collègues et notamment d’agricultrices qui souffrent des épaules et du dos, constate Michel Chevalier. Même si des efforts ont été faits pour alléger les faisceaux (autour de 1,5 kg), avec les tuyaux, le poids est toujours là. Avec la traite matin et soir, 365 jours par an, ça fait beaucoup de kilos à la fin de l’année. »
Simple et fonctionnel
Dès le départ, ils ont défini un cahier des charges strict : un dispositif simple de conception et de fonctionnement, facile à installer et à régler. Echaudé par le passé par des matériels d’élevage dont les pièces n’ont pas pu être remplacées ou au prix du neuf, Michel Chevalier voulait surtout « un matériel fiable, durable et robuste ». Il nécessite très peu de maintenance. « Volontairement, il n’y a pas d’électronique pour qu’il puisse être réparé facilement », insistent les deux inventeurs.
« En partant d’un bras passif avec juste l’assistance de ressorts, on allait dans la bonne voie, confirme Yann Dobignard. Le plus difficile a été de trouver la bonne combinaison cinématique. Au départ, je suis parti de l’idée du télescopique. Mais ce qui fonctionnait au bureau s’est avéré plus compliqué in situ avec les vaches avec des tuyaux emmêlés, et un travail particulièrement pénible pour l’opérateur. »
Après plusieurs prototypes, l’équipement dans sa version actuelle a été installé en octobre 2021 dans la salle de traite 2x5 en épi 30° chez Michel. Le système s’adapte à toutes les salles de traite en épi quelle que soit la marque mais pas à celles en traite par l’arrière (TPA) car le bras gêne l’opérateur.
« Une fois que le bras est équipé de l’élement de traite, il suit le trayeur dans son mouvement de positionnement et de pose des manchons trayeurs qui peut alors se faire des deux mains sans avoir à supporter le poids de l’ensemble sur une seule main lorsqu’on pose les manchons de l’autre main », détaille Michel. Comme il est articulé, il suit également les mouvements de la vache, ce qui évite le décrochage par des coups de pattes de l’animal. Il convient à toutes les morphologies de mamelle.
« La masse de l’ensemble à supporter par la vache est compensée par un ressort, ce qui réduit considérablement les efforts de traction des manchons sur les pis », poursuit Yann. Depuis son installation, Michel a d’ailleurs remarqué que les animaux sont plus calmes pendant la traite, ce qui améliore le bien-être animal et aussi celui du trayeur. « Je ne reviendrai pas en arrière car la tâche est beaucoup plus aisée. J’ai moins de douleurs aux épaules depuis que je l’utilise », précise Michel, qui malgré son handicap continue de traire par goût.
Le seul bémol de l’installation est de devoir lever la griffe pour l’installer sur le bras puis de la déclipser pour laver les manchons. « L’opération est très rapide. Elle fait partie du travail de préparation », indique l'éleveur.
Adaptable sur salle de traite en épi
Le système est compatible avec les accessoires de traite courante et notamment lorsqu’un animal a besoin d’être mis sur pot en cas de mammite par exemple. Il peut ne pas être utilisé par l’opérateur s’il le souhaite dans des cas particuliers (exemple : vaches nerveuses, génisses fraichement vêlées). Enfin, il est parfaitement adapté avec un système de décrochage automatique. Dans ce cas, le bras accompagne le retrait des manchons jusqu’au poste de repos sans l’intervention de l’opérateur.
La volonté des concepteurs est d’avoir un matériel abordable pour les éleveurs. Le coût de l’équipement complet d’une salle de traite de 10 postes, installé clé en main, est d’environ 6 000 € (sans compter le déplacement). Un prix raisonnable ramené aux heures de travail !