Les sérotypes de l’influenza aviaire hautement pathogène (IAHP) déclarés en Europe sont-ils transmissibles à l’être humain ?

« Le virus de la grippe aviaire hautement pathogène est un virus dynamique, doté d’une grande capacité à évoluer et à subir des modifications génétiques. Ces changements peuvent renforcer sa capacité à se propager entre espèces, y compris vers l’homme et d’autres mammifères. Le tout premier rapport sur la situation mondiale de la santé animale révèle notamment que le nombre de foyers de grippe aviaire chez les mammifères a plus que doublé en 2024, atteignant 1 022 foyers dans 55 pays, contre 459 en 2023.

La surveillance de l’évolution du virus, afin de détecter précocement les changements génétiques significatifs, est essentielle pour évaluer les risques à l’interface homme-animal. Bien que les souches actuellement en circulation en Europe aient infecté certaines espèces de mammifères, les cas humains restent extrêmement rares. Tous les cas humains signalés ont eu des contacts étroits et prolongés avec des animaux infectés. À ce jour, il n’existe aucune preuve de transmission soutenue entre humains, et les transmissions entre mammifères sont exceptionnelles.

La dernière évaluation conjointe des risques menée par l’OMSA, la FAO et l’OMS indique que le risque actuel pour la population humaine générale reste faible, et faible à modéré pour les personnes exposées professionnellement ou autrement à des animaux infectés ou à des environnements contaminés. Malgré cela, il est crucial de rester vigilant, car le virus continue d’évoluer et de franchir les barrières d’espèces. »

Sur combien de temps est efficace une campagne de vaccination préventive comme l’a fait la France en 2023 ?

« Une campagne de vaccination préventive comme celle menée en France en 2023 est conçue pour protéger les volailles sur une période donnée, généralement une saison, avec des rappels nécessaires selon le protocole vaccinal utilisé. L’efficacité dépend du vaccin, de la couverture vaccinale atteinte, et de la pression virale dans l’environnement.

Il est probable que des campagnes similaires devront être reconduites, adaptées aux dynamiques virales, aux retours d’expérience et à l’évolution des souches circulantes. La vaccination ne remplace pas la biosécurité, mais elle peut devenir un outil complémentaire précieux pour limiter la diffusion du virus et les pertes économiques.

Nos normes internationales reconnaissent la valeur de la vaccination comme outil complémentaire pour prévenir et contrôler l’IAHP chez la volaille lorsque les autres mesures sont insuffisantes. La stratégie vaccinale, incluant les espèces ciblées, le type de vaccin, le calendrier et la durée, doit toujours s’appuyer sur des données de terrain. Elle doit toujours s’inscrire dans une approche globale comprenant surveillance, biosécurité et réponse rapide aux foyers. »

Que pensent les ministres internationaux du financement des campagnes vaccinales ?

« Ce fut un véritable honneur d’accueillir 17 ministres du monde entier au démarrage de notre session générale. Leur présence a envoyé un message clair : la santé animale est essentielle, non seulement pour l’agriculture, mais pour la santé mondiale, la stabilité économique et le développement durable.

Les stratégies vaccinales sont propres à chaque pays, tout comme leur financement. « Plusieurs ministres [internationaux] ont exprimé leur volonté de mieux intégrer la santé animale dans les priorités nationales de développement », affirme Emmanuelle Soubeyran. (©  Stéphane Leitenberger)

Concernant le financement des campagnes de vaccination, plusieurs ministres ont exprimé leur volonté de mieux intégrer la santé animale dans les priorités nationales de développement, ainsi que de garantir aux services vétérinaires les moyens nécessaires pour mener à bien leur mission. Toutefois, bien que les vaccinations soient reconnues comme des outils de prévention et de contrôle rentables, leur coût demeure un fardeau pour de nombreux pays. Il a été souligné que certains de nos membres ont besoin d’un soutien financier international pour pouvoir les mettre en œuvre efficacement.

Ce dialogue ne marque pas une fin, mais le début d’une coopération plus profonde, pour faire de la santé animale une priorité partagée au niveau mondial. »

Des pays peuvent-ils être obligés de vacciner ? Comment gérer les différentes gestions sanitaires entre des pays frontaliers ? 

« Les décisions en matière de vaccination relèvent de la responsabilité de l’Autorité vétérinaire nationale et doivent être adaptées au contexte épidémiologique et socioéconomique spécifique. La décision de vacciner, ainsi que toute autre intervention de contrôle, doit être prise en étroite coordination avec les secteurs public et privé. Bien que nous encouragions fortement l’harmonisation régionale, les membres de l’OMSA restent souverains dans leur approche. Les différences de stratégie peuvent poser des défis, c’est pourquoi la transparence, la communication et la coopération au sein des régions et entre elles sont essentielles pour un contrôle efficace des maladies. »

« Les différences de stratégie [vaccinales, entre pays frontaliers] peuvent poser des défis », confirme la directrice de l'OMSA. (©  Cédric Faimali/GFA)

Où en est la surveillance mondiale ? Quels moyens sont mis en place pour l'améliorer ? 

« Nos 183 membres ont l’obligation de notifier régulièrement la présence de l’IAHP à l’OMSA, via le système mondial d’information sur la santé animale. À l’OMSA, nous publions des rapports de situation mensuels pour sensibiliser au niveau mondial et nous soutenons nos membres dans leurs plans de préparation et de riposte.

De manière générale, les efforts de surveillance et de suivi de l’influenza aviaire se sont améliorés à l’échelle mondiale au fil des années, mais des progrès restent possibles. Étant donné que ce pathogène touche la faune sauvage, le bétail et la santé publique, une surveillance intégrée selon l’approche « Une seule santé » est nécessaire.»

Vous parliez d’une banque de vaccins, pour qui est-elle disponible ?

« La banque de vaccins de l’OMSA a été créée pour aider les membres à accéder rapidement et efficacement à des vaccins de haute qualité. Elle comprend actuellement des vaccins contre la rage et la peste des petits ruminants (PPR). La banque soutient les interventions d’urgence ainsi que les campagnes de prévention dans les pays membres éligibles, mais ne remplace pas leur système national d’approvisionnement en vaccins.

L’accès est coordonné par l’OMSA en collaboration avec les autorités nationales. Lorsqu’ils sollicitent un accès à la banque de vaccins de l’OMSA, les délégués doivent justifier leur demande en expliquant comment les vaccins seront utilisés, puis rendre compte des résultats de la stratégie de vaccination. »