Pour ceux qui ont navigué au large de Santorin en soirée, le spectacle est déroutant : l’île est toute illuminée, évoquant davantage la côte densément peuplée d’Athènes qu’une île méditerranéenne. Le tourisme est le moteur de l’économie grecque. Le secteur a généré environ 30 milliards d’euros en 2023, ce qui représente environ 13 % du PIB du pays.

Baisse des surfaces agricoles

Cela est particulièrement vrai dans les îles des Cyclades. À Santorin, surnommée le Disneyland de la Méditerranée, ainsi qu’à Naxos, la plus grande île des Cyclades et celle à la plus forte activité agricole, tourisme et agriculture se disputent les terres, l’eau et la main-d’œuvre. Les surfaces agricoles diminuent de manière spectaculaire, l’eau étant engloutie par les usages domestiques en plein été — saison au cours de laquelle les cultures en ont le plus besoin —, et la main-d’œuvre agricole se reconvertit temporairement dans le tourisme, délaissant la production agricole.

Pression sur l’eau

À Naxos, la pomme de terre AOP (1) subit une forte pression du secteur touristique. Spyros Skarpos, producteur du tubercule, précise rapidement qu’il n’est pas opposé au tourisme, reconnaissant l’importance des revenus que l’activité génère pour les insulaires. Il souligne toutefois qu’il devient de plus en plus difficile de préserver la plaine de Plaka, principale zone de culture de la pomme de terre. « L’eau se fait rare, car la consommation domestique augmente fortement pendant la saison touristique. Les forages atteignent parfois 600 à 700 m, mais même à ces profondeurs, ils s’assèchent. »

Forte pression foncière

Les agriculteurs comme Spyros Skarpos sont de moins en moins nombreux, beaucoup préférant vendre leurs terrains à des promoteurs en échange d’un appartement ou d’un complexe qu’ils pourront louer aux touristes. « Nous faisons face à de plus en plus de problèmes : des constructions surgissent à côté de nos champs, arrachent nos réseaux d’irrigation que nous devons ensuite reconstruire après négociation avec les nouveaux propriétaires », explique-t-il. Selon Dimitris Venieris de l’Union des agriculteurs de Naxos, la surface consacrée à la culture de la pomme de terre sur l’île a diminué de 30 % au cours des dix dernières années. Elle représente aujourd’hui, seulement 240 hectares.

De nouvelles pratiques

Face à ces défis, il apparaît indispensable de mettre en place de nouvelles pratiques visant d’une part à préserver les ressources agricoles — assurant à la Grèce les besoins alimentaires de sa population — et, d’autre part à maintenir le tourisme nécessaire à l’économie du pays. « Le tourisme génère d’énormes revenus, une partie de ceux-ci devrait être investie dans la modernisation des stations d’épuration afin de fournir une eau adaptée à l’irrigation », suggère Yannis Paraskevopoulos, vigneron et propriétaire de la célèbre cave Gaia, dont la filière est aussi touchée par la concurrence avec le tourisme.

(1) Sous appellation d’origine protégée.