Quand la Commission européenne a redistribué les cartes des zones défavorisées en 2018, il y a eu des gagnants, mais à coup sûr beaucoup de perdants dans l’Hexagone. Face aux nouvelles règles du jeu, le ministère de l’Agriculture a eu peu de marge de manœuvre et, du jour au lendemain, plus de 5 000 éleveurs français ont été exclus de ces zones défavorisées, perdant l’intégralité de leurs ICHN, indemnités compensatrices d’un handicap naturel (voir le dossier de La France agricole du 12 octobre 2018). En 2019, ces agriculteurs exclus du zonage ont perçu 80 % du montant initial de leurs ICHN, 40 % cette année, et plus rien l’an prochain. Dans les Deux-Sèvres, par exemple, une centaine d’agriculteurs (seulement) continueront à percevoir des ICHN alors qu’ils étaient 1 100 en 2018. Deux ans pour trouver une alternative à ce changement des règles du jeu qui les prive de milliers, voire de dizaines de milliers d’euros, c’est peu.

D’autant que deux ans après cette décision, le handicap qui justifiait le versement des ICHN n’a pas disparu. Pour ne pas aller au tapis, les agriculteurs ont cherché comment s’adapter à cette nouvelle donne. Avec les collectivités territoriales, l’Administration locale et leurs organisations professionnelles, ils ont participé à des groupes de travail, mais cela a demandé du temps. Et il en faudra encore pour mettre les solutions qui émergent en œuvre. Comme, par exemple, pour aller chercher davantage de valeur ajoutée, et donc du revenu, en attaquant le marché de la restauration collective. Espérons que l’engouement récent des Français pour les produits locaux né avec la crise du Covid-19 sera un atout pour y parvenir.

Autre exemple de solution pour aller conquérir du revenu supplémentaire, les énergies renouvelables. Mais là encore, investir dans le photovoltaïque ou la méthanisation ne se fait pas du jour au lendemain. Il faut convaincre les banques de suivre. Sans compter que ces projets peuvent se heurter à des complications réglementaires ou avec le voisinage, qui ne voit pas toujours ces projets d’un bon œil.

Le travail collectif portera sans aucun doute ses fruits. Chacun y a mis de la bonne volonté, même si, en 2018, le ministère a mis un peu de temps à réaliser l’étendue possible des dégâts du nouveau zonage sur l’élevage français. À court terme, c’est sur leur sens de la débrouille que les éleveurs doivent miser. Les uns ont choisi une MAEC (lire page 12), d’autres ont investi dans un nouvel atelier, la vente directe ou ont retourné leurs prairies pour produire des céréales bio. C’est, une fois de plus, le bon sens paysan qui leur permettra de remporter la partie.