« Le monde agricole forme bien les jeunes attirés par le métier : le taux de réussite est de 70 %, mais seulement 30 % restent dans le métier », expose Laurent Paillat, maraîcher employeur de sept salariés. Également président de l’Anefa, l’association paritaire qui promeut l’emploi et la formation dans le monde agricole, il s’exprimait le 28 février 2023 à l’occasion du Salon international de l’agriculture à Paris. « On peut prendre ce chiffre de façon positive. Quelque part, il est une reconnaissance de la qualité des métiers de la production agricole. Les travailleurs agricoles sont polyvalents et capables de s’adapter à tout. C’est une façon de reconnaître la capacité collective à valoriser le savoir-être que les employeurs, en général, recherchent tant », poursuit-il.

Besoin de main-d’œuvre

Mais ce chiffre peut aussi être un indicateur supplémentaire du fossé qui commence à se creuser entre le renouvellement de la main-d’œuvre agricole, qu’elle prenne le statut de salarié ou de chef d’exploitation, et le besoin, renforcé par les départs massifs en retraite. « On parle souvent des 45 % de départs dans les cinq ans chez les chefs d’exploitation, mais il faut se rendre compte que ce taux est de 30 % chez les salariés permanents en agriculture », précise Dominique Boucherel, secrétaire général de l’Anefa et lui-même salarié d’un service de remplacement dans la Loire-Atlantique.

Alors, oui, il faudra mettre plus de moyens sur la formation dans les prochains temps, milite l’Anefa qui estime urgent d’accélérer les processus de création des programmes pédagogiques. Laurent Paillat mise aussi sur l’apprentissage. Selon Ocapiat, l’opérateur de compétences du secteur, 20 000 contrats d’apprentissage sont engagés dans la production agricole. À cela, s’ajoutent le millier de contrats de professionnalisation.

« Pour aller plus loin, il faudra reposer la question du rôle du maître de stage, propose Laurent Paillat. Nous accueillons des jeunes sur nos exploitations. Nous faisons un travail pédagogique. Mais il n’est pas reconnu en tant que tel. Le montant des aides à l’apprenti pourrait être basculé vers l’encadrant, qu’il soit chef d’exploitation ou salarié. Ça ne changerait pas les budgets, mais ça montrerait que l’apprenti n’est pas un emploi sous-payé et qu’il demande de l’attention. L’image de l’employeur agricole en serait valorisée. »

L’attractivité devient prioritaire

La question de l’attractivité s’insère donc dans les priorités à venir de l’Anefa. « Nous voulons que les jeunes posent un nouveau regard sur le métier », se fixe comme objectif le directeur de l’Anefa, Nicolas Savary. Il estime que, désormais, l’emploi agricole peut être envisagé comme une étape dans un parcours de vie, plutôt que comme un métier définitif. Cette façon de voir l’emploi entrerait plus en résonance avec les attentes du grand public.

En février 2023, l’Anefa et Pôle Emploi avaient organisé des job-datings et des journées de découverte dans plusieurs régions de France. En 2023, son effort d’attractivité portera sur l’organisation, en juin, de villages des métiers accolés aux marchés des produits locaux dans les villes moyennes. « Ça permettra de faire le lien entre l’alimentation et les métiers pour la produire », explique Nicolas Savary.