À la Ferme du Relais, au nord de Châteauroux dans l’Indre, les pierres restent, mais les équipements évoluent. Robin Doublier a succédé à son père et son grand-père. La grange, qui abritait des fosses de stockage pour des centaines de tonnes de grains dans les années soixante-dix, est désormais recouverte d’une dalle en béton et de boisseaux surélevés, afin de stocker une multitude de cultures.

Les énormes cellules ont laissé place à un atelier de transformation, avec meunerie, huilerie et fournil. La ferme, toujours céréalière, a complètement changé de modèle.

Trois fournées par semaine

En 2012, Robin et son père se mettent d’accord pour que le fils reprenne la ferme en 2018. Le jeune homme, qui a fait des études de cinéma, profite de ces six années pour voyager, se former et affiner son installation. « Dans l’idéal, nous aimerions partager la ferme avec d’autres personnes, installer un atelier d’élevage ou de maraîchage », souligne le céréalier qui cultive 90 ha. Il a monté le projet avec Gabrielle Montéard, sa compagne, qui a préféré être salariée plutôt qu’associée.

Avant de rejoindre la ferme en 2019, elle participe à un stage paysan créatif, organisé par l’Adeari (Association pour le développement de l’emploi agricole et rural de l’Indre). « Entre les temps collectifs et les stages dans d’autres fermes, la formation a été une mine d’informations, très enrichissante autant pour le projet professionnel qu’humainement », ajoute Gabrielle, qui a perfectionné le dimensionnement de son atelier.

En six ans, le couple convertit l’exploitation en bio et développe la fabrication de farine, environ 20 tonnes par an de blé, seigle, sarrasin et maïs, transformées pour partie en pain. Gabrielle et Suzanne, la salariée, effectuent trois fournées par semaine, en privilégiant des ingrédients locaux. « Nous n’utilisons pas de chocolat ni de raisin. Mis à part le sel et le sucre, tous les ingrédients sont produits à moins de 80 km de la ferme », ajoute la boulangère.

Les trentenaires pressent également de l’huile de colza et de tournesol. Ils sont en train de mettre en place une décortiqueuse pour le petit épeautre et le tournesol. Et pourquoi pas une floconneuse à l’automne, si la récolte d’avoine est abondante. « Notre objectif est d’être le plus autonomes possible et de faire vivre notre territoire grâce aux circuits courts », souligne Robin, dont la ferme accueille également trois à quatre évènements culturels par an.

Le four à bois a été acheté en kit à l’Atelier paysan pour 7 000 euros, puis assemblé. (©  Aude Richard)

Une adaptation permanente

Les jeunes agriculteurs ont investi environ 80 000 euros dans la rénovation du bâtiment et les équipements de transformation. Une somme relativement modeste car ils ont autoconstruit, eux-mêmes ou avec des amis, une bonne partie des ateliers. C’est le cas du four à bois qu’ils ont acheté en kit à l’Atelier paysan pour 7 000 euros. « Nous avons mis une semaine à l’assembler avec un ami soudeur, se souvient Gabrielle. Sans cela, il nous aurait coûté le double du prix ! C’est une façon d’apprendre en continu. »

Depuis la reprise de la ferme, le couple arrive à corréler la production et la croissance des débouchés, en grande majorité en circuits courts et à se verser 1 400 € par mois chacun de rémunération ou de salaire. Suite au Covid, submergé par la demande en farine, il a ajouté une rampe d’ensachage à leur moulin. En 2023, la crise du bio a impacté les ventes et fortement le chiffre d’affaires (blé bio à 210 €/t à la place de 400 €/t).

En 2024, les aléas climatiques ont plombé les semis et les récoltes. Même si Robin est flexible sur la rotation des cultures, le tournesol, de mauvaise qualité à cause des précipitations, ne peut pas être vendu en huile alimentaire. Le couple a cherché des adaptations et vient d’imprimer des étiquettes pour des graines à oiseaux et de l’huile pour bois. Un problème peut se transformer en opportunités !