Une terrasse avec vue sur de belles charolaises, les coteaux du Gers et, en toile de fond, les Pyrénées. Le Betty Beef, restaurant à la ferme de Mascaras, a l’atout du paysage, mais aussi de ce qu’il propose dans l’assiette. « Ce sont des bons produits et les portions sont généreuses ! », s’exclament Béatrice — dite Betty — et Philippe Villas, 55 et 64 ans. Ici, le client mange les productions d’une vingtaine d’agriculteurs des alentours dont la viande des charolaises d’Hugues, l’un des fils de la famille.

Meilleure valorisation de la viande

« Le restaurant a été lancé il y a six ans, souligne Philippe. Nous voulions mieux valoriser notre production bovine. C’est d’ailleurs pour ça que je suis passé en bio, pour les terres en 2011 et pour le troupeau en 2013. Je pensais que ça amènerait une plus-value, même si ce n’est pas forcément vrai. » Depuis la terrasse ou l’intérieur de la grange centenaire joliment rénovée, les gastronomes peuvent voir les vaches, taureaux et veaux paître. « Nous sommes en extensif, précise Hugues, 26 ans. Les vaches sont nourries quasi exclusivement à l’herbe, sauf trois ou quatre mois dans l’année, en hiver, où je leur donne de la farine et du fourrage. » Les achats de viande par le restaurant représentent une part prépondérante du chiffre d’affaires de l’EARL.

À l’issue d’un long combat, la famille Villas a obtenu la réintégration de cette zone de coteaux en zone défavorisée. (© Christophe Zoïa)

« Ce qui compte, c’est que le restaurant paie la viande de la ferme à un bon prix, met en avant Philippe. Et pour les agriculteurs à qui on achète des produits, c’est pareil : nous ne discutons pas les prix. » D’où une gestion délicate, un ticket moyen supérieur à la normale et la nécessité de proposer des plats de qualité. « Nous n’allons pas demander aux clients de faire 80 km aller-retour pour manger un steak frites, même si la viande est bonne », résume Betty. Pour cela, il faut du personnel qualifié, principalement en cuisine. « Il n’est pas simple d’en trouver, tranche Philippe. Et c’est d’autant plus stratégique que notre objectif est d’utiliser toutes les pièces de la vache. »

Des difficultés de recrutement

Ici, tous sont conscients des fragilités du restaurant. D’abord parce qu’il est situé au centre de l’exploitation, donc « invendable ou presque, sauf en s’associant », détaille Philippe qui aimerait lever le pied. Surtout, assure Béatrice, « parce que nous prenons de plein fouet les difficultés du recrutement en restauration, qui peuvent mettre en danger l’auberge du jour au lendemain ».  « Et avec le Covid, on a vu que tout peut s’arrêter très vite », ajoute Hugues.

À l’issue d’un long combat, la famille Villas a obtenu la réintégration de cette zone de coteaux en zone défavorisée. (© Christophe Zoïa)

« Le Betty Beef est une force qui peut devenir une épine dans le pied », poursuit-il. Betty imagine donc la possibilité de créer des conserves de viande, Hugues envisage de développer la vente directe. Celle-ci est dans l’ADN de la famille Villas. Pour preuve, André, le grand-père, avait créé « une sorte de boucherie lors d’un concours régional, à Auch, dans les années soixante-dix. Et il avait aussi lancé un restaurant à Gascogne Expo, la foire agricole locale. À l’époque, ça n’existait pas ! »

Philippe et Betty ont eux-mêmes vendu des colis jusqu’à Bordeaux, Nice ou Paris. Avec une quarantaine d’éleveurs charolais du Sud-ouest, ils ont monté une SAS (société par actions simplifiée) pour des plats cuisinés et de la restauration festive. Depuis le début de l’année, la structure Betty Beef a aussi investi dans un food-truck, qui se déplace à l’occasion de fêtes privées et de festivals gersois. « La vente directe, ce n’est pas fait pour tout le monde, admet Philippe. Il faut aimer les gens. »