Nourrir localement les consommateurs avec des produits de qualité transformés sur l’exploitation et vendus en direct, pour gagner en rentabilité et en autonomie : tels sont les objectifs d’Yves de Fromentel à la tête de la ferme de Beaulieu, à Pécy, en Seine-et-Marne. « Nous transformons 220 000 à 250 000 litres de lait par an issus de nos 60 vaches. Avec leur suite, elles enrichissent nos 170 ha qui les nourrissent en partie », résume-t-il.

Races rustiques

Il y a toujours eu de l’élevage sur l’exploitation familiale dont le lait était valorisé en AOC Brie de Meaux et de Melun. « Mais avec l’arrivée de Lactalis, les prix ont dégringolé. En 2009, j’ai décidé de convertir la ferme au bio, souligne Yves. Je voulais reprendre la main sur ma production, la transformation et la commercialisation afin de gagner en valeur ajoutée tout en proposant de bons produits, qui ont de la saveur, de l’odeur et se conservent. »

Des jersiaises, des norvégiennes et des normandes, plus rustiques, diversifient le troupeau jusqu’alors composé de prim’holsteins. Le responsable de l’élevage, un ancien apprenti, gère les 130 têtes de la ferme. « Entre 2011 et 2016, j’ai investi 280 000 € dans la transformation pour un démarrage de la production de la SARL La Fromentellerie en 2017. J’ai acheté par adjudication la fromagerie, que j’ai démontée puis remontée ici à la ferme », se souvient l’éleveur.

Des jersiaises, des norvégiennes et des normandes, plus rustiques, diversifient le troupeau jusqu’alors composé de prim’holsteins. (©  Florence Melix)

Huit salariés

L’exploitation compte au total huit salariés dont son fils, responsable des cultures, sa fille qui gère l’administratif, un responsable de l’élevage, un fromager, un chauffeur et trois personnes à la fabrication et la préparation des commandes. Pour travailler le lait chaud, il n’y a qu’une traite par jour.

Yaourts nature ou aromatisés, fromages blancs, fromages frais, crème, beurres, tomme, râpé, bouchons pour l’apéritif, le Petit Beaulieu… Plus de trente références sont produites et vendues dans la boutique à la ferme une fois par semaine, mais surtout auprès d’environ vingt-cinq Amap, cinq Ruche qui dit oui et autant de Locavor, ainsi que des coopératives de consommateurs, une vingtaine d’épiceries spécialisées et autant de restaurants. « La transformation en une gamme de produits étendue et la vente en direct requièrent beaucoup de main-d’œuvre, avec des charges salariales trop élevées », déplore l’éleveur.

La fromagerie permet de transformer 220 000 à 250 000 litres de lait par an. (©  Florence Melix)

Alors pour continuer à travailler à plusieurs, développer l’offre de produits et faire vivre son patrimoine bâti, l’agriculteur recherche des porteurs de projets. « Chacun aurait son rôle mais l’entraide serait reine », souffle celui qui s’enrichit des nouvelles rencontres. Une apicultrice et un berger sont déjà en place. « Un maraîcher, aidé par des bénévoles, avait commencé son activité sur nos terres ce printemps, mais il a arrêté pour des raisons personnelles. Un autre est le bienvenu ! », lance-t-il.

Pour valoriser les fruits et légumes invendus, Yves envisage de créer une conserverie qu’il pourrait louer à un nouvel arrivant. « En 2022, pour favoriser la biodiversité, nous avons planté 5 000 arbres dont des fruitiers, avec l’association Agrof’Ile. Un deuxième projet de plantation est programmé cet hiver. La conserverie permettra aussi de transformer ces fruits », se projette-t-il. Un bâtiment doit également être aménagé pour accueillir une boulangère d’ici à deux ans. « Une activité de plantes à parfum et médicinales avec une production d’huiles essentielles est aussi possible », estime l’agriculteur.

« Aujourd’hui, je ne gagne pas mieux ma vie que quand je vendais ma production à un industriel, souligne-t-il. Mais je crée de l’emploi. Je donne du sens à mon métier en nourrissant localement les consommateurs avec des produits de qualité. Et je suis plus autonome dans mes décisions car je maîtrise mon prix de vente, qui ne sera jamais inférieur à mon coût de production ! »