C’est la fin d’une histoire qui durait depuis 1873 pour la sucrerie et distillerie Ouvré Fils S.A. de Souppes-sur-Loing (Seine-et-Marne). Ce vendredi 10 janvier 2025, l’ambiance était lourde et chargée en émotion lorsque Julien Ouvré, le président-directeur général de cette entreprise 100 % familiale et indépendante, a annoncé son projet de cessation d’activité aux plus de trois cents planteurs qui travaillaient avec lui.
Dès l’automne dernier, d’importantes difficultés techniques et l’ouverture d’une enquête sur l’origine d’une pollution au sucre dans une portion du canal du Loing avaient causé l’arrêt de l’activité du site de production. Les betteraves étaient alors transformées, en prestation, dans les sucreries de Cristal Union à proximité, dans les usines d’Arcis-sur-Aube, de Pithiviers et de Corbeilles.
« Depuis, la sucrerie Ouvré n’a eu de cesse de rechercher des solutions permettant une reprise rapide de l’activité », souligne le PDG dans un communiqué du 14 janvier, mais le coût de réhabilitation, de plusieurs millions d’euros, « dépasse nos capacités financières », alors que les banques se sont retirées du projet. Pour proposer une solution aux producteurs, Julien Ouvré a conclu un « accord de partenariat » avec la coopérative Cristal Union.
Cristal Union et Tereos sur les rangs
Sous condition d’un engagement massif des planteurs avec Cristal Union, cet accord comprendrait le rachat d’actifs (stock de sucre…), et permettrait aussi à la sucrerie Ouvré d’accompagner l’ensemble des 109 salariés, et d’honorer ses engagements en cours vis-à-vis des planteurs. Un complément de prix de la récolte de 2023 et une partie de la récolte de 2024 restent en effet à payer aux producteurs. Ces derniers, qui représentent environ 5 000 ha de betteraves, ont été invités par Cristal Union à participer à des réunions locales les 13 et 14 janvier. Des contrats pour la récolte de 2025 pourraient leur être proposés en tant que nouveaux coopérateurs, ou tiers non associés via un engagement annuel.
Si Cristal Union joue la carte du lien déjà existant entre les deux groupes et de la proximité géographique grâce à plusieurs de ces outils qui ont transformé la production de 2024, ce n’est pas le seul acteur a se positionner. Tereos organise aussi des réunions d’information les 16, 17 et 20 janvier, « pour présenter la coopérative et les conditions d’apport des betteraves » en tant que coopérateur ou non. « L’objectif est de répondre aux attentes des agriculteurs et de conforter l’approvisionnement de notre sucrerie d’Artenay sur une durée de campagne moyenne de 110 jours », précise Tereos.
Du côté des planteurs, si la plupart aimeraient prendre le temps de la réflexion avant de s’engager, une certaine pression de la part des industriels est palpable. « Pour mettre toutes les chances de mon côté d’être payé les 18 €/t manquants de la récolte de 2023 et les 50 % du prix de ma récolte de 2024, je pense m’engager un an chez Cristal Union, pour voir comment cela se passe », confie un agriculteur.
Dans le département, il reste une dernière sucrerie familiale indépendante, Lesaffre Frères, à Nangis.