Sur quels critères baser le déclenchement d’un traitement phyto pour protéger au maximum les abeilles domestiques et sauvages ? Un groupe de chercheurs rattachés à l’Itsap (Institut technique et scientifique de l’abeille et de la pollinisation), le CNRS (Centre national de la recherche scientifique) ou encore l’Inrae (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement) a étudié la littérature scientifique sur la question. Leur travail de synthèse a été publié le 17 février 2023 dans la revue scientifique « Frontiers in Ecology and Evolution » (en Anglais).

Sécurité et pénibilité du travail

Les auteurs estiment ainsi que « les critères couramment considérés, tels que la température ambiante, l’attractivité des cultures ou la distance vis-à-vis du bord des champs, ne peuvent pas garantir l’absence d’exposition des butineuses lors des pulvérisations de pesticides. Les pulvérisations nocturnes de pesticides sur les cultures seraient l’action la plus efficace pour aider les agriculteurs à éviter les intoxications aiguës non intentionnelles des abeilles. »

Ils considèrent ainsi qu’« en absence d’alternatives moins dangereuses aux pesticides, la pulvérisation de pesticides doit être effectuée de nuit, même si les modalités d’application acceptables par les agriculteurs restent souvent à définir. » Ils soulignent des questions relatives à la sécurité et à la pénibilité du travail, ou encore de nuisibilité pour les riverains.

Lors des discussions relatives au plan pollinisateurs, la question d’une obligation de traitement de nuit avait été évoquée. Elle avait crispé les syndicats, avant d’être finalement abandonnée.

Pollinisateurs nocturnes

L’option reste toutefois imparfaite. Les auteurs signalent par exemple qu’environ 80 % des abeilles sont des espèces nichant au sol, dont certaines peuvent être affectées par les pulvérisations de nuit. Les pollinisateurs nocturnes, « qui contribuent au transport du pollen des plantes dans les agrosystèmes », resteraient également exposés. La pratique « n’empêchera pas non plus la contamination du nectar et du pollen », induisant une exposition orale des abeilles et la dégradation de la qualité des produits de la ruche.