Faisant suite à la publication du plan pollinisateurs, la FNSEA et JA rappellent que « l’agriculture est avant tout une solution pour les pollinisateurs », dans un communiqué de presse commun datant du 21 novembre 2021.
Distorsion de concurrence
Ils dénoncent « l’instauration d’un processus franco-français d’évaluation des produits phytosanitaires, en anticipation par rapport au cadre européen ». Ce plan met, selon eux, « les agriculteurs français en situation de distorsion de concurrence pour la protection de leurs cultures ».
« Quels nouveaux financements et outils seront disponibles pour favoriser l’implantation par les agriculteurs de couverts mellifères ou pour préserver le bon état de santé des abeilles contre les agresseurs biologiques des colonies ? », se questionnent aussi les syndicats.
Avancées sur le travail de nuit
La FNSEA et JA saluent toutefois l’ouverture permettant de déroger à l’obligation de traiter les cultures attractives seulement après le coucher du soleil, avec l’ajout d’une plage de 2 heures avant le coucher du soleil. Mais aussi la décision actant la possibilité, pendant les 8 prochains mois, de réaliser des applications sans contrainte horaire si la température est suffisamment basse pour éviter la présence d’abeilles.
« Ce délai de 8 mois doit permettre aux scientifiques de finaliser leurs travaux sur les mesures apportant des garanties équivalentes en matière de protection des abeilles, notamment en vue de permettre des traitements le matin », ajoutent-ils.
Des mesures pas à la hauteur des enjeux pour les apiculteurs
Malgré un courrier adressé au Premier ministre pour faire évoluer l’arrêté « abeilles » dans un sens plus rigoureux, l’Unaf (Union nationale de l’apiculture française) estime, de son côté, ne pas avoir été entendue.
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« Ce plan se veut très ambitieux mais en fait, il ne l’est pas vraiment avec peu de mesures à la hauteur des enjeux, estime Henri Clément, le porte-parole de l’Unaf. Le point positif, c’est que les fongicides et herbicides vont être évalués mais on ne parle pas d’effets cocktails. Et à travers les différentes actions juridiques qu’on a menées, on se rend compte que les évaluations ne sont pas assez rigoureuses. »
Traiter 2 heures avant le coucher du soleil, une catastrophe
« Aujourd’hui, l’arrêté est encore très largement en deçà de ce qu’on pouvait escompter, juge-t-il. Et l’autorisation de traiter deux heures avant le coucher du soleil est une catastrophe. En effet, on sait que lorsqu’il y a de la ressource pour les abeilles, elles continuent à butiner jusqu’à la tombée de la nuit. »
Pour trouver un accord, le syndicat avait proposé que cette mesure soit assortie d’un paramètre de température, pour que le traitement deux heures avant le coucher ne soit possible que si la température ne dépasse pas 12°C. « Mais ça n’a pas été pris en compte et c’est la porte ouverte au laxisme ! », conclut le porte-parole de l’Unaf.
Quant à Générations Futures, l’association environnementaliste estime que « l’arrêté abeilles est malheureusement en deçà de ses aspirations de protection » des pollinisateurs.
Réécriture de l’arrêté demandé
Le SNA (Syndicat national d’apiculture) et l’association Terres d’abeilles ont estimé, le 23 novembre 2021, qu’il existe des « avancées réglementaires majeures, favorables à la biodiversité et qui représentent une réelle victoire d’étape pour les apiculteurs ». Ce sont, en particulier, l’extension de la réglementation à toutes les familles de pesticides, la clarification de l’étiquetage des pesticides. Car les produits ne bénéficiant d’aucune dérogation d’usage devront dorénavant afficher « Dangereux pour les abeilles. Pour protéger les abeilles et autres insectes pollinisateurs, ne pas appliquer durant la floraison et ne pas utiliser sur les zones de butinage ».
Toutefois, ils déplorent que le texte n’ait pas appliqué l’ensemble des recommandations de l’Anses (avis du 5 février 2019). Il déplore ainsi que l’arrêté autorise les traitements bénéficiant d’une dérogation deux heures avant le coucher du soleil, sans y associer aucun critère de température extérieure maximum, ni aucune mention d’absence des pollinisateurs pendant cette période.
Autre point de crispation : l’autorisation accordée aux agriculteurs de traiter « sans contrainte horaire » jusqu’à juillet 2022 alors que l’entrée en vigueur de l’arrêté « abeilles » est fixée au 1er janvier prochain… « Nos organisations, prioritairement concernées, ont été tenues à la marge des discussions », ajoutent ces derniers qui demandent donc que soient réécrit cet arrêté en tenant compte des graves manquements identifiés.
Un arrêté antidémocratique pour la Coordination rurale
Dans un communiqué du 24 novembre 2021, la Coordination Rurale (CR), l’Union nationale des intérêts professionnels horticoles, syndicat horticole et paysagiste (Uniphor) et France Grandes Cultures (FGC) dénoncent un arrêté antidémocratique qui entraînera la disparition de nombreuses productions en France. Ils souhaitent en conséquence « rencontrer Barbara Pompili et Julien Denormandie de toute urgence ».
« Le gouvernement est totalement déconnecté du terrain et ne se rend pas compte de la réalité de notre métier, s’insurge Sébastien Héraud, responsable de la section Fruits et Légumes de la Coordination Rurale. Les impasses techniques, les distorsions de concurrence, et la problématique du travail de nuit vont fortement mettre à mal nos agriculteurs et la survie de nos exploitations. »