Un an après le lancement de CultivonsNous.tv, avez-vous le sentiment d’avoir atteint votre objectif initial de rassembler citadins et ruraux autour de l’agriculture ?
Édouard Bergeon : Nous atteignons aujourd’hui 60 000 abonnés, payants, de tous les âges et tous les milieux : rural, agricole et urbain. C’est une très bonne première année. Le mouvement devrait encore s’accélérer, puisque nous avons intégré au début du mois la plateforme de vidéos à la demande Brut X, nous serons sur la box d’Orange, en juin, et sur Amazon Prime Vidéo, en septembre. C’est une bonne chose, cela signifie aussi que l’agriculture est devenue tendance. Les plateformes veulent toutes aujourd’hui leur programme agricole.
Guillaume Canet : Il reste encore beaucoup de personnes à sensibiliser à la cause agricole. Mais je me réjouis néanmoins des témoignages d’abonnés, heureux de découvrir des documentaires riches d’informations et de messages positifs. C’est ce que nous essayons de faire passer. Il ne s’agit pas de dresser que des tableaux noirs, nous mettons en avant les initiatives de personnes qui font bouger les choses dans l’agriculture, l’alimentation et l’environnement.
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Au cours des débats tenus autour du film Au nom de la terre, votre regard sur le monde agricole a-t-il changé ?
G. C. : Oui, mon regard a changé, sur une chose en particulier : des solutions existent pour une agriculture plus vertueuse et plus rémunératrice. C’est à nous, consommateurs, de prendre la décision de faire évoluer le produit, de nous rapprocher des agriculteurs pour favoriser les circuits courts. J’ai le sentiment que même les citadins en ont pris conscience.
E. B. : Mon regard n’a pas changé. J’ai grandi dans une ferme. Je viens d’obtenir mon BPREA. Et tout au long de ma carrière de journaliste, à France 2 notamment, j’ai fait des reportages sur des agriculteurs conventionnels et bio, sur la gestion de l’eau, les néopaysans, le vin naturel, sur Paul François face à Monsanto.
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J’ai aussi fait un documentaire sur un agriculteur en difficulté, Les fils de la terre, puis un film, Au nom de la Terre. Et je continue ! Mon regard n’a pas changé. Mais celui du monde agricole, peut-être, est-il en train de commencer à changer. Ce qui est intéressant, est que tous nous convergeons aujourd’hui vers une même envie, celle de voir les agriculteurs en bonne santé, avec un revenu décent et des produits de qualité vendus au juste prix.
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Comment choisissez-vous vos sujets ?
G. C. : Jusqu’à présent, j’ai été le parrain de la chaîne, je me suis engagé et j’ai investi pour la promouvoir, et proposer des idées de sujet. Mais la ligne éditoriale est tenue par Édouard, qui fait un travail formidable pour mettre en avant une grande diversité de documentaires susceptibles d’intéresser des personnes très différentes et surtout d’engager la conversation, pas d’enfermer.
E. B. : C’est mon ventre qui choisit : si je ne sens pas un sujet, je ne le prends pas. Mais je fais en sorte aussi de raconter toutes les formes d’agriculture à travers les documentaires que je réalise, ou qui me sont proposés. Nous disposons d’une centaine d’heures de programmes aujourd’hui. Si j’essaie de faire parler tout le monde, nous ne diffusons pas cependant de documentaires sur les végans. Seul le vivant nous intéresse.
Si vous étiez agriculteur, comment envisageriez-vous votre avenir ?
G. C. : Il est difficile de se mettre à leur place. Certains subissent une telle pression économique ou familiale. Comment penser que nous ferions mieux ? Dans tous les cas, j’essaierai de tenir le coup… Nous avons besoin d’eux !
E. B. : Avec mon BPREA, mon objectif est de racheter de la terre, chez moi, dans la Vienne, et de développer du maraîchage. Mon rêve serait aussi de produire mon propre vin.