Si jamais Paris devaient être coupée de son approvisionnement alimentaire, essentiellement routier, la capitale serait affamée en cinq jours, au pire, ou sept jours, au mieux. Sortie le 29 octobre 2024, une étude de l’Atelier parisien d’urbanisme (Apur), un cabinet créé en 1967 pour accompagner les politiques publiques dans la métropole, se penche sur la résilience alimentaire de la capitale. Elle dévoile surtout la fragilité du système d’approvisionnement, essentiellement appuyé sur le réseau routier, et sur le manque criant de stockage.
Dix mille tonnes chaque jour
Dans l’ensemble, au regard de la répartition par classe d’âge de la population parisienne, le besoin est estimé à 3 090 tonnes de denrées pour nourrir chaque jour les plus de deux millions d’habitants intra-muros. Si on élargit les calculs à la Métropole du Grand Paris, il faut 10 060 tonnes quotidiennes pour nourrir les 7,1 millions d’habitants du territoire.
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Au passage, on distingue les populations particulièrement fragiles (moins de trois ans, plus de 75 ans, femmes enceintes, personnes malades, sans abri et ménages sous le seuil de pauvreté). Juste dans Paris, on identifie 920 000 personnes dans ces catégories. Leurs besoins sont estimés à 1 310 tonnes quotidiennes de denrées cuites, dont 43 000 litres de lait pour les nourrissons.
Stockages dérisoires
Ces tonnages sont habituellement assurés par des flux de denrées. Les stockages sont, en effet, très faibles. On distingue trois sources de stockage. Les placards des Parisiens sont assez peu garnis. Les réserves à domicile représenteraient entre 1,5 et 5 jours en moyenne. Les stocks disponibles dans les commerces ou les établissements de restauration collective représentent deux jours de denrées. Enfin, les cinq entrepôts de logistique alimentaire identifiés dans Paris totalisent 1,5 à 2 jours d’autonomie alimentaire. En cumulant ces données, Apur table sur 5 à 7 jours de réserves réellement utilisables.
Une production locale faible
Et on a fait le tour des solutions parce que la production locale de denrées alimentaires a une capacité assez faible en tonnages, saisonnière et orientée vers les produits à forte valeur ajoutée. En 2023, les 61 sites d’agriculture urbaine Parisculteurs ont produit 240 tonnes de fruits, légumes et plantes aromatiques, dont 100 tonnes de champignons.
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L’élargissement à la Métropole du Grand Paris n’apporte pas vraiment de résolution d’envergure. La contrainte de place y est moins pesante et permet de trouver plus de production de céréales et d’oléoprotéagineux mais on est loin de l’autosuffisance.
Flux routiers
Quand on regarde les flux d'acheminement des denrées, la fragilité de la capitale saute aux yeux : 95 % des marchandises alimentaires circulent par la route, selon différentes sources compilées par l’Apur. Le marché international de Rungis joue un rôle particulier dans ce schéma d’approvisionnement. Plus grand marché de produits frais au monde, il enregistre un passage de trois millions de tonnes chaque année, dont 1,8 million est commercialisé sur place (le reste étant du transit). Les acheteurs parisiens achèteraient 1 661 tonnes de denrées alimentaires à destination de Paris chaque jour, soit moins de 50 % du besoin journalier théorique de la population intra-muros. Là aussi, la connexion autoroutière de Rungis, entre l’A86, l’A106 et la RN7, est excellente. Mais le gestionnaire du site, la Semmaris, a pris conscience de la nécessité de développer la connexion ferroviaire et développe un projet de transport combiné qui devrait voir le jour en 2026.
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