Si la chaîne d’approvisionnement a tenu pendant la crise sanitaire, (les seules ruptures de produits en rayon au début du confinement du printemps de 2020 (pâtes, farine, œufs) ont résulté d’une forte hausse des achats en grande distribution), la Cour constate plusieurs fragilités.

Une forte dépendance de l’étranger

 

L’une des principales faiblesses concerne la dépendance de l’étranger, qu’elle se matérialise par des importations ou par l’emploi d’une main-d’œuvre étrangère (240 000 travailleurs étrangers employés dans le secteur agricole et dans les industriels de transformation comme les abattoirs et les conserveries ont été affectés par la fermeture des frontières en 2020).

 

« Pour certaines productions, la pression concurrentielle internationale liée aux différentiels de coûts de main-d’œuvre et aux écarts de réglementation fait dépendre la France d’importations en provenance ou non de l’Union européenne : ainsi, 54 % des fruits consommés (hors fruits exotiques) sont produits en dehors du territoire national », peut-on lire dans le rapport.

 

La Cour recommande de réduire la vulnérabilité aux importations en s’inspirant des modèles suisses, japonais ou finlandais. Comment ? En agissant sur les engrais chimiques dont la production nationale ne couvre que 25 % des besoins (les principaux exportateurs étant la Russie, le Maroc et l’Égypte), sur l’alimentation animale « qui repose en partie sur l’importation de soja » et sur les emballages de divers produits alimentaires pour lesquels des ruptures ont été observées comme les boîtes d’œufs.

Le besoin « urgent » d’une nouvelle stratégie

Un autre problème concerne le manque de développement des circuits de proximité. « Le degré d’autonomie alimentaire des cent premières aires urbaines françaises est en moyenne de

2 %. 97 % de la production agricole locale est consommée à l’extérieur de son territoire de production », estime la Cour des comptes.

 

Si la chaîne alimentaire tient sa force de « la solidité des acteurs économiques, de la diversité des circuits et modes de distribution et de la capacité à les réorienter rapidement en fonction des perturbations rencontrées », la Cour estime qu’il est « urgent » que « l’État se dote d’une véritable stratégie de préparation et de conduite de crise ».

 

« Son élaboration ne peut faire l’économie d’un travail prospectif sur le modèle national agricole, ce qui suppose de trouver un équilibre entre la sécurité de l’approvisionnement de la population et les flux d’échanges vers les pays clients. L’organisation de l’aide alimentaire, déléguée au secteur caritatif et aux collectivités territoriales, doit également être confortée en prévision d’une crise nouvelle », conclut la Cour des comptes.

Jean Castex partage les observations

 

Dans la réponse du Premier ministre jointe au rapport, Jean Castex « partage globalement les observations faites par la Cour sur la nécessité de renforcer la préparation aux crises futures, tout en assurant un plus fort degré d’indépendance en intrants stratégiques et en favorisant les circuits de proximité ».

 

Il a tout de même tenu à souligner à la Cour des comptes que « l’expérience a montré que les outils de gestion de crise existants, en interne au ministère de l’Agriculture, comme au niveau interministériel, présentaient déjà un degré très satisfaisant d’efficacité ».