Le blé et l’orge ont poursuivi leur tendance baissière cette semaine, et ont été rejoints par le colza et les tourteaux. Le contexte économique mondial affecte la demande et pèse sur les prix, d’autant que les disponibilités mondiales sont présentes. Sur cette fin d’année, l’Australie démarre quant à elle sa saison d’exportation avec une offre colossale et compétitive.
Le blé passe sous la barre des 300 €/t
Les cours du blé français se sont de nouveau contractés cette semaine, le rendu Rouen ayant perdu 6 €/t à 299 €/t. L’échéance mars du MATIF s’est également contractée, de 8 €/t à 299 €/t. La remontée de l’euro face au dollar, amorcée à la mi-octobre, s’est poursuivie et a conduit à une baisse plus mesurée du Fob Rouen (-3 $/t à 328 $/t). L’euro a ainsi enregistré cette semaine son niveau le plus haut depuis six mois.
Les prix français ont baissé alors même que l’Algérie a effectué un achat d’un peu plus de 500 000 tonnes mercredi soir, dont l’essentiel aurait été raflé par les pays de la mer Noire. Toutefois, la France pourrait avoir tout de même remporté quelques volumes d’après les rumeurs de marché. En Russie, les conditions météorologiques se sont un peu améliorées ces derniers jours et ont permis une reprise des chargements portuaires.
Les conditions climatiques se sont améliorées en Afrique du Nord à la faveur d’un retour des pluies au mois de décembre. Le Maroc en est le principal bénéficiaire et devrait continuer d’en profiter sur la suite du mois de décembre d’après les prévisions météorologiques. Ces pluies sont un véritablement soulagement après presque une année entière sans pluie au Maroc et une récolte 2022 absolument désastreuse conduisant à d’importantes importations.
Les blés européens face au froid
La semaine a également été marquée par des températures négatives et une faible couverture neigeuse dans l’ouest de l’Union Européenne. En France, ces conditions ne sont pas de nature à inquiéter, même si les températures ont été plus basses que les moyennes de saison.
En revanche, la situation pourrait être plus préoccupante en Allemagne où les températures minimales dans le centre et l’est du pays ont évolué entre -10°C et -14°C alors même que le manteau neigeux était presque inexistant. Il faudra attendre le dégel pour y voir plus clair, mais des dégâts sont à craindre chez notre voisin allemand.
Franche contraction des prix de l’orge
Après la semaine dernière marquée par le regain d’intérêt de la Chine pour les orges françaises, les prix de l’orge fourragère sur le marché français sont repartis de nouveau en baisse, de 10,5 €/t à 269 €/t pour le rendu Rouen (base juillet). Le recul des cours s’explique par une très forte concurrence des orges de la mer Noire et de l’Australie. En effet, les origines russes et australiennes ont évolué à la baisse depuis vendredi dernier (-6 $/t pour les orges russes et -3 $/t pour les orges australiennes) et sont cotées en prix FOB à 272 $/t et 275 $/t respectivement au 16 décembre.
Après des mois d’octobre et de novembre marqués par une très forte progression des exportations russes par rapport à l'an dernier sur la même période, les exportations semblent ralentir un peu sur décembre avec seulement 57 000 tonnes exportées au 13 décembre 2022 (à cause des conditions météorologiques défavorables). En revanche, l’arrivée sur le marché des orges australiennes permet largement de répondre à la demande et ce, malgré la dégradation des perspectives en Argentine qui pourrait conduire à une nouvelle réduction de l’estimation de production.
En quête de nouveaux débouchés dans un contexte d’offre mondiale abondante, les orges tricolores n’ont pas d’autre choix que de suivre la tendance baissière des autres origines. Le prix de l’orge française FOB Rouen a ainsi perdu 8 $/t mais reste plus cher de 20 $/t environ que les origines les plus compétitives, au 16 décembre. Ce manque de compétitivité des orges françaises se traduit par une activité portuaire peu dynamique.
À l’image de l’orge fourragère, les prix brassicoles d’hiver et de printemps ont aussi suivi la tendance baissière cette semaine (-5 €/t à 305 €/t Fob Creil pour l’orge brassicole d’hiver et -4 €/t à 326 €/t Fob Creil pour celle de printemps).
Nouvelle baisse des cours du colza
Cette semaine, les cours du colza ont de nouveau diminué, de 22 €/t en rendu Rouen, notamment sous la pression du prix des huiles. En effet, la recrudescence du nombre de cas du Covid-19 en Chine et les craintes de ralentissement de l’économie mondiale sous l’effet de la forte hausse des taux d’intérêt et de l’inflation continuent de peser sur les cours des huiles. L’assouplissement annoncé de la politique zéro-Covid en Chine laisse toutefois penser que l’économie chinoise pourrait voir son activité rebondir en cours d’année 2023.
Cependant, la baisse des cours du colza a été un peu freinée par un rebond des prix de l’huile de palme et du pétrole. En effet, d’une part, les stocks en huile de palme en Malaisie étaient finalement plus bas qu’attendu à fin novembre, en raison d’une production inférieure aux attentes. Les dégâts liés aux excès de pluies en Malaisie ont été plus importants qu’attendu. De plus, les importations d’huile de palme de l’Inde ont atteint un record historique de 1,1 million de tonnes, ce qui représente une hausse de presque 20 % entre octobre et novembre. Cela a boosté les exportations de la Malaisie et de l’Indonésie.
Concernant le pétrole, la fermeture d’un oléoduc aux États-Unis (en raison d’une fuite) a entraîné une incertitude sur l’offre à court terme et a un peu soutenu les cours sur la semaine (+6,5 % à 76 $ le baril).
Malgré ces quelques éléments de soutien, les prix du colza en France ont tout de même reculé à 549 €/t rendu Rouen le 15 décembre en raison d’un environnement lourd dû à une offre abondante (excellentes récoltes mondiales et européennes et larges importations depuis l’Ukraine et l’Australie), mais aussi d’une demande mondiale restreinte par les craintes de récession.
À noter que l’Indonésie a confirmé récemment qu’elle augmenterait l’incorporation obligatoire de biodiesel dans le diesel à 35 % le 1er janvier 2023, contre 30 % auparavant. Cela pourrait soutenir les prix des huiles et des oléagineux dans les prochains jours.
Le prix du tourteau de soja marque le pas
Le cours du tourteau de soja recule après avoir atteint un sommet la semaine dernière. Sur le CBOT (Bourse de Chicago), le prix a reculé de 15 $/t sur le rapproché pour s’afficher à 502 $/t le 15 décembre. À Montoir en Bretagne, le cours a perdu seulement 2 €/t. Il a d’abord chuté de 17 €/t entre le 9 et le 14 décembre, avant de rebondir nettement pour s’établir à 583 €/t. La baisse a surtout été marquée en début de semaine.
Les précipitations enregistrées en Argentine pendant le week-end puis sur le reste de la semaine étaient très attendues. Elles ont permis de réduire quelque peu le stress hydrique des cultures de soja, contribuant à la détente des prix du tourteau.
De plus, le retour des précipitations a permis un bond en avant dans les semis argentins. Ils ont progressé de plus de 13 points en une semaine, à 50,6 % de réalisation. L’état des cultures s’est amélioré, les champs jugés dans un état bon à excellent ayant vu leur part augmenter. Les sojas sont globalement dans des conditions correctes pour l’instant en Argentine, avec 80 % des champs dans un état acceptable, bon ou excellent.
Toutefois, la situation pourrait se dégrader dans les semaines à venir. Les prévisions météorologiques les plus récentes indiquent des précipitations largement en dessous de la normale pour les deux prochaines semaines. Cela a contribué à faire rebondir les cours des tourteaux en France en fin de semaine.
En parallèle, des inquiétudes quant à la tenue de la demande chinoise restent de mise puisque malgré le récent allégement des restrictions sanitaires, les nouveaux cas de covid viennent perturber la consommation de viandes et produits laitiers, ce qui pourrait encore affecter le secteur de l’élevage en Chine à court terme.
À suivre : contexte économique mondial (croissance, inflation), conditions météorologiques en Amérique du Sud (soja, maïs), conditions météorologiques en mer Noire (perturbations des chargements portuaires), évolution de la situation sanitaire en Chine, évolution du change euro/dollar, cours du pétrole