« Deux choix s’imposaient à nous pour revendiquer la perte des outils de production : l’Inrae et l’Anses. On a cumulé les deux actions ce matin », raconte Victor Rabier, le secrétaire général des Jeunes Agriculteurs d’Île-de-France.
Ce jeudi 28 novembre 2024 aux aurores, l’alliance syndicale FNSEA et JA a mené deux opérations « coup de poing » en érigeant un mur de parpaings devant le siège de l’Inrae (Institut national de la recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement), ainsi qu’en installant des cartons de déménagement devant l’agence de sécurité sanitaire (Anses) à Maisons-Alfort.
Des actions symboliques qui s’inscrivent dans la continuité des mobilisations menées par les deux syndicats. Après une première semaine placée sous le signe de l’opposition au projet d’accord de libre-échange entre les pays du Mercosur et l’Union européenne, la deuxième semaine s’attaque à toutes les entraves du travail des agriculteurs.
Se passer de l’Inrae pour réaliser des économies
Premier point de rendez-vous de ces opérations « coup de poing », l’entrée de l’Inrae, dans le 7e arrondissement de Paris, s’est vu bloquée par un mur de parpaings. « Symboliquement, on a installé un mur devant les portes pour dire que l’on n’est même plus dans l’attente d’éléments qui pourraient arriver de l’Inrae », commente Victor Rabier, qui se dit prêt à « travailler avec d’autres agences à l’avenir ».
🚨MOBILISATION SYNDICALE 🚨
— JA Région IDF (@JAregionIDF) November 28, 2024
Devant l’@INRAE_France, les @JAregionIDF et la @FrseaIDF proposent au @gouvernementFR de réaliser des économies.
1,1 millard €/an, aucune solution concrète sur les exploitations.
Ramenons du bon sens dans ces institutions ! pic.twitter.com/2hgaluZY49
Pour le représentant des JA en Île-de-France, l’Inrae a fait son temps : « Je ne dis pas qu’il ne se passe rien à l’Inrae, mais il n’y a rien qui arrive dans les cours de fermes. L’Inrae a fait son job il y a cinquante ans, en sortie de guerre, avec l’arrivée des engrais et des phytosanitaires sur les fermes. »
« On peut économiser 1 milliard d’euros par an en fermant définitivement l’Inrae », annonce Victor Rabier. Une proposition pour le gouvernement à la recherche d’économies ? La banderole « A vendre, ne sert plus à rien » accrochée devant le siège de l’Inrae est on ne peut plus clair. « Nous sommes quand même une des seules professions qui déclare au gouvernement lors d’une manifestation : on vous propose d’économiser de l’argent », ironise-t-il.
Stop à la surtransposition avec l’Anses
Rendez-vous était ensuite donné devant l’Anses, à Maisons-Alfort (Val-de-Marne) pour la suite de la mobilisation. Là encore, les agriculteurs ont répondu présents, « entre 200 et 250 personnes », selon JA, dont la plupart avaient participé à la première opération tôt ce matin.
Des cartons de déménagement portant pour inscription les mots « Déménagement en cours » et des banderoles « Non aux surtranspositions » ont été érigés devant le bâtiment. Le message relayé par l’alliance syndicale est clair, « on leur propose de déménager et de rejoindre l’Efsa [Autorité européenne de sécurité des aliments] à Bruxelles », pour éviter la surrèglementation française.
🚨OPÉRATION 2 EN COURS 🚨
— FRSEA Ile de France (@FrseaIDF) November 28, 2024
Après l’INRAE les agriculteurs franciliens sont en train d’organiser le déménagement de l’ANSES à Bruxelles
Stop aux surtranspositions ! Stop aux entraves ! @FrseaIDF @JAregionIDF pic.twitter.com/hlLTXVMJMO
« Aujourd’hui, tout ce qui est décidé au niveau européen est réétudié au niveau de l’Anses en France », s’indigne Victor Rabier. Conséquence avec cette surtransposition, « on se retrouve confrontés à des pertes de production, de la concurrence déloyale avec nos voisins européens, et des importations de produits qui ne respectent pas la moitié du quart des règlementations que l’on nous impose. On n’a pas besoin que l’on nous en mette encore plus sur les épaules. »
« Un agriculteur a besoin de concret pour travailler, il ne peut pas juste se contenter de décisions politiques », insiste-t-il, dénonçant selon ses mots « une agence scientifique qui se met au service de décisions politiques ».
Des instituts « conscients des problèmes »
Après l’opération menée devant l’Anses, le secrétaire général des JA Île-de-France a été reçu avec, d’autre part, la direction générale de l’agence. « Le message a été entendu, mais je suis très dubitatif sur le rendez-vous que nous avons eu. On sent quand même une orientation politique dans une agence qui se revendique scientifique. Or on ne peut pas combiner la science et la politique », rapporte-t-il.
Réagissant de son côté sur France Inter, le président de l’Inrae Philippe Mauguin répond : « Il n’y a pas de divorce, mais des attentes fortes. » [...] « Nos chercheurs ne sont pas à côté, ils sont à la fois conscients des problèmes et travaillent avec les agriculteurs au quotidien. »
Un communiqué de l’institut avait été publié dans la matinée, réaffirmant son « engagement au service du bien commun et de l’ensemble des citoyens ». « Nous poursuivrons notre mission avec détermination et humilité, déclarait l’Inrae, pour poursuivre [nos] recherches au meilleur niveau pour concevoir des systèmes de production agricoles et alimentaires durables et rémunérateurs, […] pour accélérer le transfert des innovations. »
Quant à la suite des mobilisations, la fin des travaux d’automne devrait favoriser de plus grandes disponibilités des agriculteurs pour se mobiliser dans les jours et les semaines à venir, avertit Victor Rabier.