La campagne de 2022-2023 pour le lait de brebis s’achève dans une ambiance morose. L’inflation a pesé sur la consommation des ménages qui ont boudé les produits fabriqués à partir du lait de brebis. « Les achats de fromages de brebis ont reculé de 6 % sur les sept premiers mois de 2023, selon le panel Kantar, par rapport à la même période de 2022, constate Cassandre Matras, de l’Institut de l’élevage (1). Pendant le même temps, leur prix a progressé de 14 %. La tendance est plus ou moins marquée selon les appellations. » Le prix du roquefort a augmenté de 13 %, alors que les achats ont baissé de 4 %. Les ventes d’ossau-iraty reculent de 4 % alors que les prix ont grimpé de 17 %.
La collecte se maintient
« La collecte s’est toutefois globalement maintenue au cours de la campagne », observe Cassandre Matras. D’octobre 2022 à juillet 2023, elle affiche une légère progression de 0,3 %. L’évolution varie d’un bassin de production à l’autre. L’Occitanie a enregistré une hausse de 2 % tandis qu’en Nouvelle-Aquitaine et en Corse, la collecte a chuté de respectivement 5 et 7 %. Le volume produit en bio qui représente près de 10 % du total collecté, accuse en léger repli sur la période (–0,4 %).

Le recul des achats a impacté la fabrication de fromages au lait de brebis. Celle-ci a reculé de 6 % d’octobre 2022 à juillet 2023. Les évolutions diffèrent selon les produits. La fabrication de roquefort a baissé de 10 %, tandis que celle d’ossau-iraty se replie de 11 %. « Les produits ultra-frais s’en sortent mieux à –1 % », ajoute Cassandre Matras. Les fabrications de fromages bio sont aussi très impactées : –4 % pour les frais et –12 % pour les autres 12 %. « Le lait non utilisé pour la fabrication a vraisemblablement été exporté, avance Cassandre Matras. Nous n’avons pas les moyens de le contrôler, car il n’y a pas de code douanier spécifique au lait de brebis. »
Prix « en retard »
Concernant le prix du lait, le chiffre définitif pour la campagne qui s’achève n’est pas encore connu. « Mais l’augmentation pourrait être de 8 à 10 %, soit 80 à 120 €/1 000 litres, ajoute Cassandre Matras. Le but étant de rattraper le retard de la campagne précédente. » À 1 056 €/1 000 l, la hausse sur la campagne de 2021-2022 n’avait été que de 2,3 % par rapport à la campagne de 2020-2021, bien loin de la progression des charges.

À l’échelle européenne, l’évolution du prix du lait français est très en retard par rapport aux autres pays producteurs. Entre les campagnes de 2019-2020 et 2022-2023, le lait français a augmenté de 156 €/1 000 litres, alors que celui de Sardaigne progressait de 671 €/1 000 litres, l’Espagnol de 509 €/1 000 l et le Grec de 712 €/1 000 l. Cette situation récente est toutefois liée à différents facteurs. En Grèce par exemple, la collecte a baissé alors que la demande reste forte et cela a dopé les prix.
(1) Lors d’une conférence au Sommet de l’élevage, le 4 septembre 2023.