Dans une note publiée le 6 octobre 2023, Deepika Thapliyal, Sylvia Tranganida et Aura Sabadus, de l’institut Icis (1), examinent les défis auxquels est confronté le secteur des engrais en Europe. L’industrie des engrais a été fortement impactée par les coûts records de l’énergie après que la Russie a réduit ses livraisons de gaz à l’Europe l’an passé. Selon les autrices, la demande globale en gaz dans les pays du nord-ouest de l’Europe, les plus consommateurs, continue à être inférieure de plus de 20 % à la moyenne quinquennale suivie par Icis.

Des usines pourraient fermer

Bien que les prix du gaz aient été presque divisés par dix depuis les niveaux records atteints à la fin d'août 2022, ils demeurent néanmoins supérieurs à la moyenne à long terme. Les autrices de la note estiment que la demande industrielle atone et les stocks abondants devraient faire pression sur les prix du gaz, « même si cela dépendra en grande partie de la météo cet hiver ».

La contraction inattendue des exportations chinoises soutient aussi les prix mondiaux de l’urée et du phosphate. La hausse des prix du gaz et leur volatilité, associée à la maintenance des installations de production d’engrais, ont réduit les marges des industriels, qui, dans certains cas, ont compensé en augmentant les prix de vente.

« En l’absence de signes d’une nouvelle baisse des prix du gaz, l’impact à long terme sur la rentabilité du secteur des engrais constitue une préoccupation », ajoutent les autrices, qui craignent des fermetures définitives d’usines. Il n’y en a pas eu en Europe depuis l’annonce par BASF de la fermeture d’unités de production, dont d’ammoniac, à Ludwigshafen d’ici à la fin de 2026, en raison de coûts de production élevés. « Mais la menace est réelle pour plusieurs producteurs », insistent-elles.

Demande en berne

La relance du secteur est aussi freinée par l’afflux de produits russes dont la production peut coûter jusqu’à sept fois moins cher qu’en Europe. Les importations de produits tels que l’urée sont abondantes.

De plus, la demande pour la plupart des produits azotés reste insuffisante. Plusieurs explications sont avancées pour expliquer cette demande en berne : saisonnalité, contexte inflationniste, prudence des agriculteurs dans l’application de produits fertilisants.

(1) Independent Commodity Intelligence Services.