« La souveraineté, ce n’est pas de l’autarcie et du repli sur soi, c’est une interdépendance choisie, a rappelé le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, en introduction de la table-ronde organisée par l’AGPB (1) le 2 mars 2023 sur la géopolitique du blé. La France est un pays exportateur de blé, et il faut qu’on assume cette idée-là. Notre sujet, ce n’est pas que de nourrir notre population, c’est aussi de peser dans les affaires du monde. »
Invités à l’évènement, Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques du Sénat, Guillaume Kasbarian, président de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, Sébastien Abis, directeur du Club Demeter et chercheur associé à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris), et Eric Thirouin, président de l’AGPB et d’Unigrains, ont échangé sur le sujet.
Souveraineté des moyens de production
Les intervenants sont unanimes : derrière la « souveraineté du blé », se trouve une souveraineté des moyens de production. « Et nous ne sommes plus du tout autonomes en intrants », a déploré Sophie Primas. « Les textes continuent à sortir pour réduire nos moyens de production. Comment peut-on assurer cette souveraineté alimentaire et cette géopolitique du blé si on a des vents contraires ? » a appuyé Eric Thirouin. Ce dernier faisait notamment référence à la stratégie européenne "Farm to fork".
« Nous, politiques, devons [également] combattre les interdictions sans solution et les distorsions de concurrence. Il faut qu’on retrouve le sens des priorités, qu’on a du mal à trouver dans la population française », a renchéri Sophie Primas.

Ambitions environnementales maintenues
L’agriculture « productiviste », ennemie du développement durable ? a questionné l’animateur. « Je réfute cette idée », a répondu Guillaume Kasbarian, rappelant au passage que l’agriculture « intensive » consomme moins de foncier. Et pas question de revoir les ambitions environnementales de l’Union européenne et de la France à la baisse.
« On aura besoin d’une agriculture qui soit durable, estime Sébastien Abis. On a besoin de faire drastiquement mieux qu’hier, mais on doit raisonner à 360°. […] Le problème de cette stratégie "Farm to fork", ce n’est pas son ambition autour du climat, c’est qu’on ne l’habille pas d’un narratif et d’une réponse concrète sur le plan géopolitique. […] On doit trouver un bon compromis sur ce double combat, productif et climatique. »
(1) Association générale des producteurs de blé.