L’histoire
Louis avait consenti à Étienne un bail verbal portant sur des herbages. Les parties, qui se connaissaient bien, avaient fixé le montant du fermage dans le cadre d’un accord oral. Au cours des années 2016 et 2017, Étienne avait rencontré des difficultés financières l’empêchant de régler les fermages. Aussi, Louis lui avait-il adressé, les 28 septembre 2017 et 8 mars 2018, deux commandements de payer les fermages dus au titre des années 2016 et 2017.
Le contentieux
Les commandements étant restés infructueux, Louis avait saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en résiliation du bail. Comme il avait fondé son action sur l’article L.411-31, I, 1° du code rural, il convient d’en rappeler l’économie : le bailleur peut demander la résiliation du bail rural s’il justifie de deux défauts de paiement de fermage ayant persisté à l’expiration d’un délai de trois mois après la mise en demeure postérieure à l’échéance.
Louis était convaincu de la pertinence de sa demande. Il avait adressé deux commandements de payer, espacés par un délai de trois mois et portant, chacun, sur plusieurs échéances. Ils précisaient le montant des fermages dus et étaient donc réguliers.
Pourtant, une question se posait en raison de l’insuffisance des précisions de l’article L. 411-31. En effet le texte, qui vise les mises en demeure, ne donne aucune précision sur leur contenu. Quelles indications doivent-elles apporter au preneur ? Doivent-elles indiquer le mode de calcul du fermage pour chaque échéance ?
Étienne s’était fondé sur ces incertitudes juridiques pour s’opposer à la demande et avait fait valoir que le défaut de paiement réitéré de fermage ne peut être invoqué par le bailleur en cas de raisons sérieuses et légitimes. Pour Étienne, de telles raisons étaient établies en raison du montant excessif du fermage et, d’autre part, les commandements de payer n’étaient assortis d’aucun document faisant apparaître clairement le mode de calcul des fermages réclamés.
Le tribunal paritaire et la cour d’appel avaient donné raison à Étienne. Aucune quittance mentionnant le montant du fermage, qui n’avait pas été fixé dans un bail écrit, n’avait été délivrée à Étienne. En outre, aucune facture appelant le paiement ne lui avait été transmise et enfin les commandements de payer ne détaillaient pas le mode de calcul du fermage.
Les juges en avaient, alors, déduit qu’à la date de la demande de résiliation, Étienne justifiait de raisons sérieuses et légitimes de non-paiement des fermages. La demande de résiliation ne pouvait aboutir. Cette solution a été approuvée par la Haute juridiction.
L’épilogue
On peut déplorer que ni la loi, ni la jurisprudence n’aient fixé avec précision le contenu des mises en demeure de payer les fermages. En présence d’un bail verbal, le bailleur doit notifier des mises en demeure détaillant avec précision le mode de calcul du fermage pour chaque échéance.