L’histoire
Bien qu’il soit en déclin constant depuis la publication du statut du fermage, le contrat de métayage suscite encore des débats juridiques délicats.
La Champagne n’y échappe pas. Max, était installé dans les coteaux champenois au cœur de la côte des Blancs. Il avait constitué une EARL et pris à bail à métayage quelques parcelles plantées en chardonnay, appartenant au GFA du Mousseux. Ces dernières étaient mises à la disposition de l’EARL. Les années passant, les rapports entre le GFA et Max s’étaient tendus. Aussi, ce dernier avait-il décidé de demander la conversion de son bail à métayage en bail à ferme, ce que le GFA avait refusé.
Le contentieux
Max avait alors renouvelé sa demande devant le tribunal paritaire des baux ruraux en invoquant l’article L. 417-11 du code rural. Ce texte dispose que « tout bail à métayage peut être converti en bail à ferme à l’expiration de chaque année culturale, à partir de la troisième année du bail initial […] ; toutefois, nonobstant toute disposition contraire, la conversion ne pourra pas être refusée lorsque la demande sera faite par le métayer en place depuis huit ans et plus ».
Pour Max, sa conversion automatique en bail à ferme ne pouvait pas lui être refusée dans la mesure où plus de huit années s’étaient écoulées entre la conclusion du bail à métayage et sa demande. Le GFA s’y était pourtant opposé au motif qu’elle imposait une modification importante des conditions du contrat initialement accepté. Mais ni le tribunal ni la cour d’appel n’avaient été convaincus : ils avaient ordonné la conversion du contrat de métayage en bail à ferme.
Le GFA, qui estimait perdre sa liberté commerciale, ne pouvait pas en rester là. Devant la Cour de cassation, son avocat avait invoqué la loi organique sur le Conseil constitutionnel. Il avait demandé de renvoyer à cette juridiction la question de savoir si l’article L. 417-11 du code rural - imposant au propriétaire la conversion du bail à métayage en bail à ferme - est contraire au droit de propriété, à la liberté contractuelle, et à la liberté d’entreprendre protégés par la Constitution. Pour écarter cette demande de renvoi et rejeter le pourvoi, la Cour de cassation a relevé que l’article L. 417-11 avait déjà été déclaré conforme à la Constitution dans le cadre du contrôle a priori de la loi du 1er août 1984, relative au contrôle des structures et au statut du fermage. Il est vrai qu’une décision du Conseil constitutionnel du 26 juillet 1984 avait admis que les modalités de cette conversion étaient fixées dans les conditions habituelles. C’est-à-dire soit par voie d’accord entre les parties, soit par voie de recours aux tribunaux, de sorte que la disposition critiquée ne pouvait pas méconnaître aucun principe ou règle de valeur constitutionnelle.
L’épilogue
Max va donc pouvoir poursuivre la mise en valeur des parcelles viticoles librement et pour la durée du bail restant à courir. Il payera désormais un fermage calculé selon les conditions fixées par l’arrêté préfectoral pour les cultures pérennes. Pour autant, il ne pourra pas échapper à une éventuelle demande d’indemnisation du GFA, si celui-ci estime avoir subi un préjudice occasionné par le changement de statut commercial, social et fiscal à la suite de la modification du bail.