Depuis le début de ses relevés météorologiques en 1961, la Chine n’a jamais connu d’été aussi chaud. Elle traverse une canicule historique tant par sa durée que par son ampleur. Principal réservoir d’eau potable du pays, le fleuve Yangtsé est à sec en de nombreux endroits, affichant un sol craquelé. Depuis deux mois, de nombreuses villes chinoises vivent au rythme des alertes quotidiennes aux fortes chaleurs, forçant les autorités à rationner l’électricité.
> À lire aussi : La sécheresse et la chaleur ont flingué les rendements européens (23/08/2024)
Un appel à protéger les cultures
Ces conditions météo représentent un défi pour l’agriculture, dans un pays déjà en temps normal en déficit de terres cultivables. La sécheresse est notamment problématique pour les cultures de riz et de soja. Dans ce contexte, quatre ministères ont appelé mardi à prendre des mesures pour protéger les cultures et à utiliser chaque goutte d’eau avec « parcimonie ».
« L’étendue rapide de la sécheresse, exacerbée par des températures élevées et des dommages causés par la chaleur, fait peser une grave menace sur la production agricole d’automne », souligne un avis publié notamment par le ministère de l’Agriculture.
> À lire aussi : « Sans eau, il n’y a pas d’agriculture », rappelle Marc Fesneau (23/08/2022)
Ces derniers mois, des spécialistes s’inquiétaient déjà pour les récoltes du pays, en raison des restrictions sanitaires contre le Covid, qui perturbent les échanges et la logistique, et ont retardé les semences au printemps. La sécurité alimentaire est un sujet sensible en Chine car le pays a dans son histoire été frappé par des épisodes de famine.
La Chine assure plus de 95 % de ses besoins en riz, blé et maïs. Mais de mauvaises récoltes risquent d’accroître les importations du pays plus peuplé du monde, au moment où l’offre de céréales est déjà mise à mal par la guerre en Ukraine. Plusieurs grandes villes ont enregistré les journées les plus chaudes de leur histoire, avec jusqu’à 45°C relevés dans le sud-ouest du pays.
« C’est la pire vague de chaleur jamais enregistrée » en Chine, assure le responsable climat et énergie de Greenpeace pour l’Asie de l’Est, Liu Junyan, basé à Pékin. Et « l’impact du changement climatique s’intensifie […], donc il est probable que des records de chaleur soient à nouveau battus l’an prochain », ajoute-t-il.
Des pluies artificielles
Début août, les services météorologiques chinois ont reconnu que le pays avait vu ses températures augmenter deux fois plus vite que la moyenne mondiale depuis 1951, une tendance qui devrait se poursuivre à l’avenir. En manque d’eau pour ses cultures, la Chine tente de provoquer artificiellement des pluies en lançant dans le ciel des projectiles chargés avec de l’iodure d’argent, selon des images de la télévision publique CCTV.
L’assèchement des cours d’eau, qui alimentent les barrages hydrauliques, force par ailleurs les autorités à rationner localement l’électricité, au moment où les climatiseurs tournent à plein régime. Le manque d’eau est crucial notamment dans la province du Sichuan (sud-ouest), qui compte près de 84 millions d’habitants et dépend à 80 % des barrages pour son électricité. Ces difficultés posent un défi au poumon économique de la Chine, car les régions côtières du Jiangsu et du Zhejiang ainsi que l’Anhui (est) sont alimentées par l’électricité du Sichuan.
Par mesure d’économie, nombre d’usines et d’entreprises ont suspendu leur activité, tandis que dans la municipalité-province de Chongqing (sud-ouest), où habitent 31 millions de personnes, les centres commerciaux ne peuvent plus ouvrir que de 16 h à 21 h. À l’autre bout du pays, Shanghai a ainsi éteint temporairement les éclairages décoratifs aux alentours de sa célèbre avenue du Bund, bordée habituellement de gratte-ciel illuminés et écrans publicitaires.