Si les élevages de buffles pour le lait sont rares en France, ceux pour la viande le sont encore davantage. Florence et Alain Olive, du Gaec de Souègnes, à Massat, en Ariège, se sont lancés dans cette aventure il y a six ans. Progressivement, ils ont augmenté leur cheptel bubalin réduisant leur troupeau de vaches allaitantes. « Aujourd’hui, on est à 65 mères, dont deux tiers de buffles, et ça nous va très bien, sourit Alain Olive. L’élevage de buffles est vertueux et rentable. »

Une conduite entièrement à l’herbe

Le couple voit de nombreux avantages dans cette espèce. D’abord, « elle est rustique. Les buffles peuvent être élevés, se reproduire et faire du lait tout à l’herbe ». Pas besoin de céréales, donc, juste du foin comprenant des légumineuses pour les cinq mois d’hiver passés en bâtiment. Le couple dispose de 50 ha de prairies autour de la ferme, et de 80 ha de quote-part numeris temporis dans une estive proche.

Ensuite, « ces animaux sont très dociles et se comportent très bien en estives », se félicite Alain. Des veaux de bufflonnes sont d’ailleurs déjà nés durant la transhumance. « Depuis six ans, je ne suis jamais intervenu sur un vêlage », ajoute-t-il. La stabulation n’a pas nécessité d’aménagement particulier pour accueillir les buffles, si ce n’est l’achat d’une cage de contention pour la prophylaxie. Les prises de sang sont plus délicates et nécessitent un animal bien bloqué.

Des femelles vendues pour le renouvellement

Au rayon de la fertilité, « on compte sur un petit par an », poursuit Alain. La durée de gestation des bufflonnes est de dix mois, mais le retour en chaleur est rapide. Le troupeau est conduit en monte naturelle, avec deux mâles présents sur l’exploitation. La rusticité de l’espèce se traduit aussi sur des frais vétérinaires qui « tendent vers zéro, observe-t-il. Les buffles ont été touchés par la FCO et la MHE. Il y a eu des retards de vêlage, mais beaucoup moins que chez nos vaches allaitantes. Cerise sur le gâteau, la cohabitation ne pose aucune difficulté. Et, du point de vue chromosomique, le croisement vache x buffle est impossible. »

Florence et Alain conservent une partie des jeunes femelles pour le renouvellement de leur cheptel. Les autres quittent l’exploitation après le sevrage, entre 1 et 2 ans, pour rejoindre d’autres élevages. Florence et Alain se séparent aussi de bufflonnes plus âgées, vendues autour de 10 ans, avec leur veau. Elles peuvent continuer à produire, sans qu’Alain ne dispose du recul nécessaire pour savoir à quel âge elles terminent leur carrière de reproductrice.

« On produit à moindre coût et on vend plus cher »

Après six ans d’activité dans le domaine, les Olive garantissent qu’ « il y a un marché intéressant pour la viande de buffle. De notre côté, nous n’arrivons pas à répondre à la demande ». Les broutards sont abattus entre 8 et 16 mois d’âge, après une finition à l’herbe, sauf exception. Par exemple quand le foin est de mauvaise qualité, nécessitant une complémentation d’orge et/ou de triticale. Les carcasses pèsent entre 160 à 220 kg.

Depuis quatre ans, les éleveurs écoulent toute leur viande bio en vente directe : à la ferme, dans des restaurants, des boutiques, sur des marchés et foires ou via des market-places. Ils produisent également, en quantité moindre, des boîtes de conserve et de la viande séchée, de même qu’un peu de savon avec le lait. Le prix de la viande ? « Celui des pièces nobles varie entre 28 et 30 €/kg, la saucisse à 18 €, et les pièces à cuire autour de 16 € », énumère Florence Olive. Et Alain d’ajouter : « On produit à moindre coût mais on vend plus cher. En même temps, c’est de la viande de qualité et on se sort deux salaires. »

Citons toutefois deux inconvénients : « Il n’y a pas de marché à l’exportation, comme pour le broutard. Donc l’éleveur doit créer son marché. » Et « il y a environ 5 % de perte de plus, à la découpe, que sur nos bovins. » Pas de quoi freiner les deux Ariégeois, qui n’excluent d’ailleurs pas d’accueillir un associé. Alain, 67 ans, pourrait en effet bientôt prendre sa retraite.