Mélanger différentes variétés de plantes modifie leur immunité. C’est le résultat d’une étude publiée en septembre 2023 dans la revue PLOs Biology de chercheurs de l’Inrae, de l’Institut Agro Montpellier, du Cirad, du CNRS et de la Yunnan Agricultural University (Chine). Depuis quelques années, les professionnels constatent un engouement pour les mélanges de variétés pour la culture de blé : environ 18 % des surfaces cultivées de blé tendre le sont en mélanges.

« On sait que c’est une pratique vertueuse pour le contrôle de maladies. Les mélanges créent des barrières à la dispersion des maladies », explique Jean-Benoît Morel, directeur du PHIM (Plant Health Institute of Montpellier). Mais le comportement des mélanges est variable. Pour les optimiser, il est nécessaire de les comprendre. C’est dans cette optique que son équipe s’est intéressée à ce sujet. Si des processus « barrières » se font à l’échelle de la parcelle, les chercheurs ont mis en évidence une seconde réponse, à plus petite échelle, entre deux plantes.

Une gestion collective de l’immunité

Les biologistes ont testé la réaction d’environ 200 paires de plantes, soit du riz, soit du blé, à deux pathogènes : Magnaporthe oryzae (la pyriculariose du riz) et Puccinia triticina (la rouille brune du blé). Ils constatent que la coculture de deux variétés différentes, en absence d’infection, provoque des changements chez les plantes : elles ajustent leur immunité. « Ce que ça suggère, c’est qu’il y a une gestion collective de l’immunité. C’est très original chez les plantes », s’enthousiasme Jean-Benoît Morel.

Mais les résultats sont différents selon les conditions. Dans le cas du blé, l’effet est bénéfique dans la grande majorité des cas, et les plantes résistent mieux. Pour le riz, les résultats étaient plus aléatoires, et des effets négatifs ont même été observé pour quelques paires. Certains mélanges sont donc favorables, tandis que d’autres sont défavorables. « Ça permet peut-être d’expliquer la grande variabilité observée aux champs », suggère le directeur du PHIM.

Dans le cas du blé et de la rouille du blé, les chercheurs ont déjà identifié les gènes d’intérêt et vont pouvoir les communiquer aux sélectionneurs. Mais un des constats fait lors de cette étude est que, chez les variétés anciennes, cette capacité à ajuster l’immunité se fait mieux que chez les variétés modernes. Il est probable que cette faculté ait été éliminée au fil des croisements. Les sélectionneurs vont donc devoir le prendre en compte s’ils veulent mettre aux points des mélanges pertinents.