« La décision sera rendue d’ici à la fin de semaine », a déclaré le magistrat du Conseil d'Etat au terme de cette audience qui s’est prolongée pendant près de trois heures. La plus haute juridiction administrative française avait été saisie fin juillet selon une procédure d’urgence dite de « référé suspension » par les Soulèvements de la terre. Celle-ci vise le décret de dissolution pris le 21 juin 2023 par le gouvernement qui reproche au collectif d'« appeler » à des violences et d’y « participer ».

Bataille juridique

Le gouvernement avait annoncé son intention de dissoudre ce mouvement le 28 mars, quelques jours après de violents affrontements entre gendarmes et opposants à la construction de retenues d’eau à Sainte-Soline (Deux-Sèvres). Dans son décret, il affirme que « ce groupement incite à la commission de sabotages et dégradations matérielles, y compris par la violence ».

Ces assertions le collectif les conteste, jugeant que les faits qui lui sont reprochés sont « inopérants », « matériellement inexacts » ou ne lui sont pas « imputables ». C’est « un mouvement composite qu’on ne peut pas dissoudre comme on ne peut pas dissoudre par exemple le mouvement féministe, a affirmé Aïnoha Pascual, avocate du mouvement, avant l’audience. La question à laquelle devra répondre le Conseil d’État, c’est : peut-on réellement dissoudre un courant de pensée ? »

À l’audience, les avocats du collectif ont fustigé les nombreuses « approximations » et « contre-vérités » avancées selon eux par le gouvernement. Évoquant les violences alléguées, Maître Pascual s’est interrogé : « pourquoi imputer la seule responsabilité aux Soulèvements et pas à la Confédération paysanne ou à Extinction rébellion ? » alors que les manifestions étaient réunies à l’appel de plusieurs organisations.

Dans l’attente du jugement sur le fond

Le Conseil d’État a rappelé que quelle que soit sa décision, elle « ne présagera pas » de celle qui sera rendue sur le fond, sans doute pas avant un ou deux ans. La plupart des procédures de dissolution de ces dix dernières années ont visé des groupes d’extrême droite ou des mouvements islamistes. Si la grande majorité des recours contre ces décisions a été rejetée, en mai 2022, le Conseil d’État avait suspendu en référé la dissolution du Groupe antifasciste Lyon et environs (Gale), estimant que les éléments avancés par le gouvernement « ne permettaient pas de démontrer que le Gale avait incité à commettre des actions violentes et troublé gravement l’ordre public ».