Après Dewayne « Lee » Johnson, un Américain atteint d’un lymphome non-hodgkinien, c’est un autre californien, Edwin Hardeman, qui accuse le Roundup d’avoir contribué à son cancer, du même type que celui de Dewayne « Lee » Johnson.

La transparence en question

Cet habitant du comté de Sonoma, au nord de San Francisco (ouest), affirme avoir usé abondamment du Roundup pour désherber sa propriété depuis les années quatre-vingt jusqu’en 2012. Il a porté plainte contre Monsanto début 2016, un an après avoir été diagnostiqué.

 

Selon la plainte, Monsanto, désormais propriété de Bayer, « savait ou avait les éléments pour savoir que le Roundup était défectueux et non sûr » et qu’il pouvait « entraîner le cancer ou d’autres maladies ou blessures graves ».

 

« L’information que Monsanto a fournie […] ne contenait pas les avertissements et précautions adéquats qui auraient permis à Edwin Hardeman […] d’utiliser le produit de façon sûre », ajoutent ses avocats, accusant aussi, entre autres, la firme « d’avoir diffusé des informations erronées, fausses et trompeuses ».

 

Monsanto, qui vend du Roundup dans le monde entier depuis plus de 40 ans, s’en tient toujours à sa ligne de défense : ses produits ne sont pas dangereux si on respecte les conditions d’utilisation, et des centaines d’études scientifiques le prouvent.

Une première au niveau fédéral

Ce nouveau procès, organisé également à San Francisco, est le premier à s’ouvrir au niveau fédéral, l’affaire Johnson étant restée au niveau de la Californie. Il est juridiquement lié à ces centaines d’autres contre le Roundup à travers les États-Unis (un même juge a supervisé les procédures préprocès avant de renvoyer chaque affaire à sa juridiction).

 

Sans qu’il s’agisse d’une action en nom collectif (« class action ») puisque les procès seront distincts, le jugement qui sortira de celui-ci donnera un signe important aux autres juridictions et servira de « test ».

 

Le précédent du procès Johnson devrait aussi bien sûr être dans toutes les têtes pendant ces débats, qui devraient durer quatre à cinq semaines. En août, un jury populaire avait condamné Monsanto à lui verser 289 millions de dollars de dommages compensatoires et « punitifs », estimant que son produit avait considérablement contribué à la maladie du plaignant et qu’il avait sciemment omis d’avertir des risques.

 

En octobre, une juge avait toutefois réduit ces sommes à 78,5 millions de dollars, estimant la décision du jury disproportionnée, mais sans revenir sur le fond du verdict, pour lequel Bayer a fait appel.

En deux temps

À la demande de Bayer, le procès Hardeman se déroulera en deux temps : une première phase tentera de déterminer si le Roundup est responsable du cancer du plaignant. Si le jury estime que c’est le cas, il devra décider si oui ou non, Monsanto a une responsabilité (parce qu’il aurait connu mais caché les risques) et si oui, quels sont les dommages et intérêts à verser.

 

Pour le juge, la scission des débats est censée aider le jury à décider de la responsabilité éventuelle du produit, sans être influencé par la réputation de Monsanto, qui a une image plus que controversée dans le monde, accusé notamment d’avoir manipulé des études.

 

C’est donc pendant la première phase que les deux parties s’opposeront à coup d’études scientifiques complexes, la défense affirmant qu’elles prouvent l’innocuité du glyphosate, le plaignant assurant qu’elles sont biaisées et ne prouvent rien.