« L’idée était de ne plus dépendre à 100 % d’un circuit de lait standard. La transformation fromagère nous trottait dans la tête depuis la crise laitière de 2009 », explique Frédéric Sudre, associé avec son épouse Nathalie et son fils Nicolas à Gelles (Puy-de-Dôme). L’arrivée de ce dernier en 2018, très motivé sur le sujet, BTS agroalimentaire de l’ENILV d’Aurillac (Cantal) en poche, permet de concrétiser le projet. Un an après son installation en 2018, les premières fabrications des deux pâtes persillées auvergnates, bleu d’Auvergne et fourme d’Ambert sortent de l’atelier nouvellement construit. Les éleveurs ont investi 330 000€ dont 55 000€ de subventions pour la reconversion du hangar (voir encadré) et du matériel de fabrication neuf.

Nicolas gère la fabrication, aidé d’une salariée embauchée à plein temps. "Nous consacrons 6 heures le matin à la fabrication et 2 heures l’après-midi pour les différents retournements des fromages. » Le mardi après-midi est voué aux préparations des commandes.  Le magasin de vente à la ferme est ouvert de 9 h à 19 h du lundi au samedi. La production est également vendue à des magasins de producteurs, des épiceries locales, des crémiers, des GMS, des grossistes, sur un marché par mois et sur des évènements particuliers. Ce surcroît de travail a motivé l’installation de Nathalie, la mère de Nicolas, et l’embauche d’un apprenti.

© Monique Roque Marmeys - La création d un atelier de transformation permet la fabrication des AOP bleu d Auvergne et fourme d Ambert depuis l’automne 2019.

Un lait irréprochable

« Nous nous attachons à produire des fromages réguliers et de grande qualité ", soulignent les éleveurs qui ont revu en amont certaines conditions de production de leur lait. Le nombre de vaches a été réduit de dix têtes pour assurer un meilleur confort aux animaux dans une stabulation de 55 places. Les tapis individuels ont été remplacés par des matelas neufs plus confortables pour un montant de 12 000 €. Un robot racleur (20 000 €) du caillebotis assure une meilleure propreté des mamelles. L’hygiène de traite est devenue drastique. Les associés ont ajouté un système pour filtrer l’air des pulsateurs. « La qualité de l’air est primordiale pour les pâtes persillées afin d'éviter le développement de moisissures indésirables », précise Nicolas. 

« Une fabrication fermière au lait cru est une épée de Damoclès permanente au-dessus de la tête. »

Les dix griffes de la machine à traire ont été remplacées par un équipement de dernière génération assurant un meilleur confort de traite aux vaches (trois points de compression au lieu de deux) et à l’éleveur (griffes plus légères, plus maniables, plus faciles à nettoyer).

Ils traient désormais à deux personnes pour privilégier une hygiène de traite irréprochable. Auparavant, un seul lavage à l’aide d’une lavette humide et un post-trempage étaient pratiqués. Aujourd'hui, la traite compte quatre passages en pré-traite : un premier moussage, un essuyage avec une lavette humide individuelle, un second moussage, un séchage au papier et un trempage en post-traite. Le temps de traite a augmenté de 20 minutes matin et soir. Nicolas ne va jamais à l’étable le matin avant de fabriquer.

Ration sèche hivernale

Une ration sèche composée de foin et d’enrubannage est distribuée le soir durant tout l’été pour favoriser la production d’un lait régulier. Cette régularité facilite le travail de transformation, en particulier les conditions de caillage. Les vaches pâturent au fil durant la journée. Leur ration de base hivernale pour 22 kg de lait/jour est quant à elle complétée avec de l’enrubannage, du foin, du regain et un correcteur azoté et énergétique. Un complément est distribué à l’auge pour les plus fortes productrices. Les vêlages sont étalés sur l’année. Depuis 2019, l’âge au premier vêlage est passé de 32 mois à 26 mois pour gagner en place et en productivité. Des montbéliardes ont été introduites dans le troupeau prim'holstein avec l’objectif d’une proportion à 50/50 des deux races. « J’aime bien cette race mixte et nous souhaitons augmenter la fromageabilité de notre lait », précise Nicolas.

(1) École nationale des industries du lait et des viandes.