À chaque atelier d’engraissement sa stratégie. Certains éleveurs engraissent l’intégralité de leurs veaux sevrés, tandis que d’autres commencent par un petit lot puis augmentent progressivement. Bruno et Elsa Serieys, jeune couple d’éleveurs installés à Labesserette (Cantal), ont opté pour la deuxième méthode. « Nous finissions déjà nos vaches et nos génisses, donc passer à l’engraissement des mâles ne nous faisait pas peur », explique Bruno, à la tête d’un troupeau de 110 mères salers.

Lors de son installation en avril 2024, Elsa s’est naturellement investie dans l’atelier d’engraissement de l’exploitation. « Je me suis demandé pourquoi nous envoyions nos mâles en Italie au lieu de les valoriser localement, explique-t-elle. C’est alors que nous avons découvert le projet de la coopérative Altitude, à savoir la création d’une filière « Salers Primeur Altitude », qui correspondait parfaitement à nos valeurs. » Il s’agissait alors d’optimiser l’alimentation et maximiser son efficacité pour prévoir une dizaine de têtes supplémentaires à la finition.

Une ration quotidienne à 2,22 €

L’ensilage de maïs est distribué à volonté, complété de 3 kg de céréales également produits sur la ferme. Le seul achat concerne le correcteur, à hauteur de 2,50 kg d’aliment à 30 % de matière azotée totale (MAT). Le coût de cette ration s’établit en moyenne à 2,22 € par tête et par jour, pour un lot engraissé pendant 210 jours. Le couple distribue manuellement la ration. « En fonction du nombre de seaux que j’ai préparés en amont, je sais quelles quantités je dois donner à quels lots, explique Elsa devant son chariot dédié au transport de ces récipients. L’objectif est d’ajuster au plus juste la ration afin de garantir une bonne marge sur les mâles. »

« Nous réalisons une pesée tous les mois afin de suivre leur gain moyen quotidien (GMQ) et d’adapter la ration, indique Bruno. La référence reste la fourchette basse du poids. Dès que les critères du contrat sont remplis, les taurillons sont vendus. Il n’est pas question de prolonger inutilement la finition. » Sur leur premier lot d’essai, le couple a enregistré un GMQ de 1,40 kg/j, générant une marge sur coût alimentaire de 506,63 € par animal.

Le contrat, filet de sécurité

Tant que les conditions climatiques le permettent, les stocks du Gaec Serieys suffisent à couvrir la ration des mâles, historiquement repoussés jusqu’à 430 kg avant d’être exportés. « Avec ce premier lot, nous voulions estimer les marges potentielles, précise Bruno. Nous avons signé le contrat lorsque le broutard salers était vendu 1 200 €, pour une marge brute de rachat en jeune bovin garantie à 780 €. »

Mais les cours des bovins ont flambé en 2024, toutes catégories confondues. « Le prix de rachat a été réévalué en intégrant 30 % du cours du jeune bovin (JB), calcule l’éleveur. Une marge brute de 100 € de plus a donc pu être dégagée, soit une revalorisation de 25 centime/kg carcasse. » Cette contractualisation reste leur filet de sécurité. « Le prix est sécurisé, ce qui nous permet de nous projeter sereinement. Et si le marché grimpe, nous en bénéficions aussi », se réjouit Bruno.

« En termes de temps de travail, cela ne me change pas grand-chose », confie Elsa. Les dix broutards ont complété la dernière case du bâtiment d’engraissement dans lequel l’éleveuse passe déjà matin et soir. « Il faut compter environ cinq minutes supplémentaires par jour pour distribuer la ration jusqu’au bout de l’allée, estime-t-elle. Cela demande un peu plus de précision, mais rien de contraignant. » Pour une marge sur coût alimentaire quotidienne de 2,43 € par tête, les éleveurs ont un avant-goût des bénéfices potentiels d’un engraissement de leurs mâles, sans investissements colossaux.