« Dans quelques grammes de litière forestière, il y a une vie incroyable : des bactéries photosynthétiques, acidolactiques ou encore fixatrices d’azote, des levures, des champignons… », liste Nicolas Lemane, conseiller technique auprès des établissements Dupré-Lardeau, dans le sud de l’Indre. Avec un groupe d’agriculteurs, le négoce a fait le choix de travailler sur des méthodes permettant d’améliorer la qualité des sols agricoles. Et parmi elles : l’épandage de litière forestière fermentée, aussi appelée « Lifofer ».

Orienter le profil bactérien

Le principe est simple : multiplier les micro-organismes présents dans les sols forestiers, pour ensuite les appliquer dans les parcelles. « L’objectif est d’orienter le profil bactérien des sols naturellement, avec des micro-organismes autochtones », indique Nicolas Lemane. L’hypothèse formulée est que cet apport créerait un environnement favorable à la croissance des plantes.

La préparation du produit commence par le prélèvement de litière forestière en cours de décomposition, de préférence dans un bois à proximité et peu perturbé par l’homme. À cela s’ajoutent du petit-lait (source de bactéries lactiques), du sucre facilement fermentable (mélasse de canne à sucre par exemple), une source d'amidon et de fibre (son de blé, litière), et de l’eau non chlorée. Le mélange solide obtenu, bien tassé, doit reposer environ 1 mois à 25°C dans un récipient hermétique pour qu’une fermentation anaérobie s’y opère.

L’étape suivante consiste à faire infuser la phase solide obtenue dans une cuve de 1 000 litres remplie d’eau non chlorée, d’un peu de mélasse et de petit-lait. Une semaine de fermentation à environ 25°C termine le processus. L’opération d’infusion peut être réalisée plusieurs fois : 30 kg du mélange initial permettent d’obtenir 4 000 litres de Lifofer. Le liquide obtenu, à utiliser dilué de 5 à 10 % du volume de la bouillie de pulvérisation, peut être épandu avec du matériel classique.

Phase initiale de tests

Nicolas Lemane précise que le produit est photosensible : les cuves doivent être opaques ou enrubannées, et l’application faite préférentiellement le soir. Il estime que la meilleure période pour l’aépandage correspond aux séquences poussantes (automne, printemps).

L’expérience en est à ses tout débuts. Un essai a été réalisé en 2022 sur tournesol. Les résultats sont jugés « prometteurs » par les établissements Dupré-Lardeau, notamment vis-à-vis de la résistance de la culture au manque d’eau. La sécheresse, marquée l’année dernière, a toutefois pris le dessus en fin de cycle, ne permettant pas de mettre en évidence une éventuelle différence de rendement. Une deuxième phase de test a été lancée en 2023.