« J'ai été élevé par les vieux. Donc, j'aime bien mettre de l'argent de côté et, quand je peux, je me permets d'investir. » François Manent, 31 ans, est attaché aux anciens, à ses racines : « Il faut rentrer dans la modernité sans oublier d'où on vient », affirme-t-il. Et il se souvient que c'est son grand-père, Augustin, qui, venu des Pyrénées voisines, s'est installé dans ces coteaux de Saint-Pé-Delbosc en Haute-Garonne, en 1963.

« De 6 hectares en 36 parcelles, il est passé à 22 hectares d'un seul tenant, ça lui a changé la vie ! », s'exclame son petit-fils. Puis, c'est Aimé, le fils d'Augustin qui a repris et agrandi l'exploitation, avant que François ne prenne à son tour le relais, voilà quatre ans. Chacun ajoutant bien sûr sa pierre personnelle à l'édifice familial.

En plus de l'élevage « historique » de brebis tarasconnaises et de leurs agneaux, François a ajouté des vaches gasconnes et des veaux sous la mère (son père faisait des broutards, qu'il a abandonnés). Il se souvient : « Quand j'étais petit, dès que j'ai vu les Gasconnes, j'ai su que c'était pour moi. En plus, on est dans leur fief historique. J'avais aussi dans l'idée de les amener en montagne. Toujours pareil, parce que j'en avais entendu parler par les vieux... »

Les racines, toujours ! Les terres de son grand-père, à Gouaux-de-Luchon, que sa tante avait reprises et dont elle lui a fait don en partie, ont donc permis à François Manent de mener ses vaches à viande en estive. « Je fais partie du groupement pastoral bovin. On a un berger là-haut, mais je vais voir mes vaches tous les 15 jours », témoigne-t-il.

Une nouvelle IGP pour les ovins

Les tarasconnaises et leurs agneaux, de même que les vaches allaitantes et leurs veaux ne transhument pas. « Le veau fermier élevé sous la mère, il ne boit que du lait, indique l'éleveur. Il est sous label rouge, ce qui est valorisant pour moi et pour mes bêtes. En plus, je le vends un peu mieux qu'un broutard alors qu'il me coûte moins cher. » Voilà tout juste un an que ses veaux sont labellisables, ce qui lui garantit un prix minimum de 5,5 euros le kilo. Il a également obtenu l'agrément bœuf gascon label rouge, mais n'a pas encore vendu de bête pour le moment.

Enfin, brebis et agneaux disposent depuis longtemps, sur l'exploitation, du label rouge agneau fermier « sélection des bergers ». Et de l'indication géographique protégée (IGP) agneau des Pyrénées, obtenue par la filière il y a quelques semaines. « Pour moi, l'IGP ne change pas grand-chose en termes de rémunération, mais c'est la reconnaissance d'un signe de qualité, se félicite-t-il. C'est valorisant. »

Quasi-autonomie alimentaire

Pour nourrir le cheptel, « on est quasiment autonomes », souligne l'agriculteur haut-garonnais. Si environ 70 hectares sont affectés aux prairies, il cultive 10 hectares d'orge, autant de triticale et de maïs. La parcelle de maïs est irriguée. « Si on a une année qui est au ras des pâquerettes en termes de fourrages, alors on ensile le maïs. Et si on a assez de fourrage, on le vend. »

Une partie des vaches transhumant, « ça fait qu'on utilise moins de foin. On n’en achète quasiment jamais : les bonnes années, on préfère le garder. » Côté prairies, l'éleveur place aussi ses brebis dans une parcelle de 4 hectares qui accueille des panneaux photovoltaïques.

Quasi-autonomie alimentaire et production achetée à un « bon prix » : « C'est vrai que j'ai un EBE correct. Et comme je suis encore chez mon père, j'ai peu de charges. » Aimé, le papa âgé de 65 ans, continue de donner un coup de main. « Avec mon père, on ne voit pas toujours les choses de la même manière, admet François Manent. Mais je crois qu'il est content de voir que j'ai repris l'exploitation. »

D'ailleurs, le jeune agriculteur envisage des investissements. « J'aimerais faire un pôle pour les vaches et un autre pour les brebis, parce qu'aujourd'hui, tout est un peu éparpillé sur six bâtiments. J'aimerais aussi changer l'atelier de place. » Et construire sa propre maison, ici, sur les terres choisies par ses ancêtres.