Chez Jean-Claude Quillet, le dernier travail du sol remonte à vingt-trois ans. Installé avec son fils Anthony à Montlouis-sur-Loire (Indre-et-Loire), ce céréalier en agriculture de conservation est passé par de nombreuses techniques et plusieurs marques et modèles de semoirs durant sa carrière. « On a commencé par des John Deere mécaniques, puis les versions pneumatiques. J’ai également eu un Semeato. » Depuis 2015, il réalise ses semis de cultures et de couverts avec un semoir conçu suivant son propre cahier des charges.

 

Jean-Claude Quillet a choisi de concevoir son propre semoir de semis direct afin qu’il corresponde à ses souhaits. © P. Peeters
Jean-Claude Quillet a choisi de concevoir son propre semoir de semis direct afin qu’il corresponde à ses souhaits. © P. Peeters

Inspiration canadienne

Pour concevoir son outil, Jean-Claude s’est intéressé aux technologies présentes outre-Atlantique, comme chez le canadien Bourgault ou encore Pillar. « Ce qui me plaisait chez eux, c’était un élément avec un double angle pour le disque semeur, un angle d’attaque et un angle d’entrure. En effet, avec ce système, l’horizon est peu perturbé, le pouvoir de pénétration est important et il y a moins de paille dans le fond du sillon. » L’agriculteur, riche de plusieurs voyages en Amérique du Nord, que ce soit au Canada pour voir les constructeurs ou aux États-Unis pour rencontrer des agriculteurs, décide finalement de fabriquer sa propre machine.

Le semoir repose sur quatre roues à crampons de grande dimension. Elles sont montées en boggies deux par deux pour le suivi du terrain. © P. Peeters
Le semoir repose sur quatre roues à crampons de grande dimension. Elles sont montées en boggies deux par deux pour le suivi du terrain. © P. Peeters

 

« Le semoir Bourgault me convenait, mais le constructeur ne proposait pas de modèles adaptés à l’Europe. J’ai voulu acheter seulement des éléments mais ça n’a pas pu se faire. Par contre, j’ai pu utiliser des éléments de chez Pillar, montés sur un 750A John Deere, se souvient-il. Le problème du système Pillar, c’est qu’ils sont reliés au châssis par un bras et je voulais une liaison avec un parallélogramme, comme chez Bourgault. » En 2013, il décide donc de faire son propre semoir pour qu’il corresponde à ses demandes : un élément monté sur parallélogramme et un disque avec un double angle.

Les éléments semeurs sont reliés au châssis par un parallélogramme équipé d’un vérin hydraulique. Le tout sert à relever l’élément en fourrière et assure un bon suivi du sol par les pièces travaillantes. © P. Peeters
Les éléments semeurs sont reliés au châssis par un parallélogramme équipé d’un vérin hydraulique. Le tout sert à relever l’élément en fourrière et assure un bon suivi du sol par les pièces travaillantes. © P. Peeters

 

Du débit de chantier

« Nous sommes partis sur un 8 mètres de large car j’avais peur pour la hauteur une fois replié. Après coup, je me dis que même 10 mètres ça aurait été », sourit Jean-Claude. « Nous cherchions du débit de chantier car, avec la partie prestation, environ 800 ha sont cultivés, et si l’on rajoute les couverts, nous semons à peu près 1 000 ha par an avec. Depuis cette année, il en fait moins avec l’arrivée du Condor (lire l’encadré ci-dessous) », explique l’agriculteur.

 

Même à 9 km/h, le semoir perturbe peu la surface. © P. Peeters
Même à 9 km/h, le semoir perturbe peu la surface. © P. Peeters

L’intégralité du châssis et des éléments semeurs ont été réalisés avec l’aide d’un chaudronnier (également dessinateur industriel). Pour les éléments semeurs, les disques viennent des forges de Niaux et les roues de chez FarmFlex. Grandement inspiré de ceux du constructeur canadien, les éléments possèdent un disque avec un angle d’attaque de 14 degrés et un angle d’entrure de 7 degrés. Chacun d’entre eux est monté sur parallélogramme et possède son propre vérin. Ils sont terminés par une roue de rappui crantée en acier. Les éléments sont montés sur deux rangées, avec un écartement entre rangs de 20 cm.

 

L’élément semeur se compose d’un disque avec un angle d’entrure et un angle d’attaque. Il est complété par une roue Farmflex et une autre de rappui en acier. © P. Peeters
L’élément semeur se compose d’un disque avec un angle d’entrure et un angle d’attaque. Il est complété par une roue Farmflex et une autre de rappui en acier. © P. Peeters

Les trémies, les distributions et les tuyaux ont été fournis par EcoMulch. Le semoir possède deux trémies. « La première est en acier, elle sert pour la semence. Nous en voulions une autre en Inox pour incorporer de l’engrais au semis, mais nous ne le faisons pratiquement plus. » Les éléments présents sur le semoir ne possèdent qu’un point de chute. L’engrais est donc mélangé à la semence et appliqué sur le rang.

 

Les éléments sont disposés sur deux rangées assez éloignées pour faciliter leur accès. Chaque rangée dispose de 20 éléments distants de 40 cm. L’écartement entre rangs est donc de 20 cm. © P. Peeters
Les éléments sont disposés sur deux rangées assez éloignées pour faciliter leur accès. Chaque rangée dispose de 20 éléments distants de 40 cm. L’écartement entre rangs est donc de 20 cm. © P. Peeters

L’ensemble pèse près de 9 tonnes. Il repose sur quatre roues. « J’ai pris des roues à crampons et de grand diamètre pour éviter que ça lisse ou marque en conditions humides. » De plus, elles sont montées en boggies, deux par deux pour améliorer le suivi du terrain. Grâce à une vitesse de croisière de 8-9 km/h et 8 mètres de large, le chantier est efficace. « Avec les disques, nous avançons plus vite qu’avec des dents, car l’élément perturbe très peu la surface. Nous essayons de faire 50 ha par jour, avec une moyenne de 5 ha/h. » Avec ce débit de chantier, la consommation du tracteur est d’environ 8 l/ha. « Mais tout est fait avec ce seul passage », conclut Jean-Claude.

Pierre Peeeters