Qu’est-ce qu’AgriCare 53 ?

C’est un dispositif de prévention porté par le Centre hospitalier de Laval et destiné aux agriculteurs de la Mayenne. Il a été mis en place à la fin de 2024, en partenariat avec la MSA et la chambre d’agriculture. À ma connaissance, il est unique en France. AgriCare 53 prend la forme d’une journée d’hospitalisation consacrée à un bilan de santé. C’est très complet, avec des consultations de santé universelle (mesure de la pression artérielle, examen clinique, bilan sanguin, examen d’urines, consultation ophtalmologique, dermatologique, gynécologique, bilan dentaire avec imagerie et mise à jour du carnet vaccinal), et des consultations ciblées à partir d’un questionnaire préalable.

Comment accède-t-on à ce dispositif ?

Par son médecin traitant (les généralistes mayennais ont été informés de notre démarche) ou sur invitation de la MSA. Pour l’instant, celle-ci repère les bénéficiaires en croisant des données personnelles, en regardant depuis combien de temps elle n’a pas activé de remboursement pour tel ou tel assuré, et des données territoriales. On sait en effet que certains territoires sont moins pourvus en professionnels de santé que d’autres. Depuis le mois de novembre, l’hôpital a organisé quatre journées AgriCare 53 et trois autres sont prévues en mai et juin. À cette date, une quarantaine d’agriculteurs auront bénéficié du dispositif.

AgriCare 53 est en place depuis quelques mois. Quels sont les premiers éléments de bilan ?

Cet hiver, nous avons reçu vingt-deux personnes, femmes et hommes à parts égales. Le plus jeune bénéficiaire avait 25 ans. La moyenne est de 54 ans. Je peux déjà dire qu’on a refait beaucoup de vaccins. Je n’ai pratiquement pas vu un seul carnet vaccinal à jour. La plupart des personnes présentaient également des douleurs musculosquelettiques. Deux d’entre elles avaient besoin d’être opérées dans un délai proche.

Ce premier bilan semble montrer des retards de soins. Comment les expliquez-vous, vous qui, fille et petite-fille d’agriculteurs, connaissez le milieu agricole de l’intérieur ?

Je ne pense pas que la population agricole soit réticente aux soins, pas plus qu’une autre en tout cas. Par contre, elle est loin des soins. Ceci est plutôt lié à l’histoire, à l’organisation de notre système de santé français. Par ailleurs, elle a des contraintes spécifiques de disponibilité (c’est très vrai pour les éleveurs laitiers), de saisonnalité, d’imprévus, etc. AgriCare 53 les prend en compte.

Le dispositif intègre également un volet sur la recherche clinique. Pourquoi ?

Nous y tenions pour plusieurs raisons. La première, c’est qu’en matière de santé, la population agricole présente là aussi des spécificités. On le sait pour des maladies comme le cancer de la peau, de la prostate, Parkinson, etc. Concernant les troubles musculosquelettiques, un interne travaille d’ores et déjà sur les données d’AgriCare 53 pour sa thèse. J’espère que d’autres travaux de recherche suivront. Pour l’hôpital de Laval, ce volet est un moyen de renforcer son attractivité auprès des internes et des professeurs de CHU.

Quel avenir pour AgriCare 53 dans un département qui compte 6 800 exploitants agricoles ?

Nous verrons. Le dispositif existe, il répond à un besoin, mais il doit aussi composer avec les contraintes de l’hôpital. La principale d’entre elles tient à l’organisation de ces journées, qui mobilisent plusieurs spécialités. À l’exception de la consultation dermatologique assurée par un médecin du CHU d’Angers, toutes les autres sont prises en charge par les professionnels de Laval.